Du bois pour fertiliser les sols cultivés

 

Espaces naturels n°72 - octobre 2020

Le Dossier

Sophie Giraud, responsable pôle développement territorial, PNR golfe du Morbihan, sophie. giraud@golfe-morbihan.bzh
 

Bois raméal fragmenté, copeaux issus de taille de haies..., l’utilisation du bois pour enrichir la terre suscite de plus en plus l’intérêt des agriculteurs. En témoignent les expérimentations conduites au sein des Parcs naturels régionaux du golfe du Morbihan et des Caps et Marais d’Opale.

Parcelle en bio et en agroforesterie ayant reçu 150 m3/ha de copeaux de bois au printemps 2020. L'expérience vise à comparer divers indicateurs selon la densité de copeaux.    © Emilie Lacour - PNR Caps et Marais d’Opale

Sollicité par des agriculteurs, le Parc naturel régional du golfe du Morbihan lance, en 2011, une expérimentation pour régénérer la fertilité (aggrader) des sols situés sur le littoral. L’épandage de Bois raméal fragmenté (BRF) - broyat de jeunes rameaux de bois - est la solution retenue1. Les objectifs visés sont multiples : amélioration agronomique des sols, augmentation de leur biodiversité,
réduction des intrants chimiques pour limiter leur transfert vers le milieu marin, réduction de la consommation d'eau. L’étude est menée de 2011 à 2016 sur deux parcelles d’un hectare chacune mises à disposition par un agriculteur. Une parcelle reçoit 300 m3 de BRF en mars 2011, l’autre servira de témoin. En mai, un semi de ray-grass et de trèfl e est réalisé. Puis l’agriculteur suit son itinéraire
technique classique : une fauche en juin, pas de traitement chimique ni de fertilisation, exception faite d’un chaulage2 en 2013. Des suivis agronomique et microbiologique sont réalisés annuellement.
Pour la parcelle témoin, sont effectués un état initial (T0) en 2011 et des mesures en 2015 et 2016. De l’analyse des résultats, on peut retenir plusieurs éléments marquants. Tout d’abord, on constate une amélioration de la fertilité du sol qui se traduit en particulier par une capacité d'échange cationique et un taux de matière organique plus élevés les premières années ; cependant, après cinq ans, ces taux reviennent à peu près à leur valeur initiale. La biomasse (bactéries, vers de terre) est plus importante que sur la parcelle témoin (multipliée par 3,8 pour les vers de terre). La structure du sol est améliorée avec une meilleure capacité d’infi ltration de l’eau (vitesse d’infi ltration multipliée par 1,5). Le système racinaire de la culture est plus développé, aussi bien en pourcentage de recouvrement qu’en profondeur maximale d’enracinement. Enfin, le sol est beaucoup plus souple lorsque l’on marche sur la parcelle. Ces résultats permettent de conclure, dans le cas présent, à une aggradation des sols à l’issue des cinq années d’expérimentation. Ils témoignent aussi de l’intérêt de renouveler le BRF tous les cinq ans pour la maintenir. Dans un objectif d’économie circulaire, une réflexion a ensuite été menée pour tester le BRF en association avec d’autres sources de biomasse végétale. Plusieurs sources ont été caractérisées, comme des végétaux issus de déchetterie et de taille de haies bocagères. Reste à concrétiser ces pistes en plein champ... La valorisation par un retour au sol est un véritable enjeu pour l’agriculture, notamment pour une meilleure résilience face au changement climatique, et pour la biodiversité, par le maintien et l’implantation de haies bocagères

(1) Le BRF permet de mettre à disposition très rapidement les bactéries et champignons de la lignine du bois.
(2) Technique d’amendement utilisée pour améliorer la structure du sol et corriger son acidité.

Aller plus loin : Rapport de l'étude disponible sur www.parcgolfe-morbihan.bzh