Construire une barrière électrique

 
pour protéger les troupeaux

Espaces naturels n°24 - octobre 2008

Méthodes - Techniques

Robert Wojciechowski
Périmètre - Clôtures, applications sur l’environnement

 

Les clôtures sécurisent le bétail en le protégeant des prédateurs. Elles représentent un obstacle au déplacement de la faune sauvage comme aux utilisateurs de l’espace.

La visibilité, la conception, le choix de la puissance, l’éducation de l’animal ou encore l’entretien sont autant d’éléments à prendre en compte pour construire une barrière électrique.
Ainsi, pour qu’une clôture fonctionne bien, il est nécessaire que l’éleveur ou le propriétaire du terrain s’implique. Il doit acquérir un maximum de références pour le choix du matériel, maîtriser la technique de pose, accepter d’entretenir, de contrôler périodiquement et d’adapter son matériel.
Apprentissage. Plus psychologique que physique, la barrière électrique nécessite de former le bétail au respect des limites (sous peine de multiplier les interventions de maintenance). Cet apprentissage s’opère en groupe ; cependant, lorsqu’il est calme, qu’il a grandi avec la clôture électrique, que la ressource en eau et en nourriture est suffisante, l’animal n’a aucune raison d’essayer de sortir du clos.
La clôture idéale. Le dispositif le plus efficace est celui à sept fils alternés : positif (+) négatif (-) de 120 cm de haut. Cette technique permet de pallier l’insuffisance du système de mise à la terre.
Le fil inférieur (à 15 cm maximum du sol), positif, dissuadera tout passage sous les lignes. Le second choix pour l’animal sera alors de pénétrer les lignes. Le contact entre le fil positif et négatif sera dissuasif. Des lignes correctement tendues éviteront aux animaux domestiques ou sauvages de rester prisonniers des fils.

Quel espacement pour les fils ?

• Le premier reprend la configuration
du terrain à plus ou moins 15 cm (+),
• le deuxième à 30 cm (-),
• le troisième à 45 cm (+),
• le quatrième à 60 cm (-),
• le cinquième à 75 cm (+),
• le sixième à 95 cm (+ ou -)
• le septième à 120 cm (+).

Quelle puissance ?
5 000 volts sur les lignes sont considérés comme un minimum. Une faible « punition » intrigue l’animal, et l’incite à revenir sur la zone de contact, voire à occulter la peur du franchissement.

Entretien. Outre un contrôle électrique régulier, effectué à l’aide d’un voltmètre, l’état de la barrière doit être examiné périodiquement. L’erreur de montage, le matériel inadapté ou le manque d’entretien des lignes sont autant de facteurs pour que le prédateur apprenne à ne plus se méfier du système.
Le contrôle annuel du système de la terre de l’électrificateur est également recommandé y compris le maintien de la visibilité de barrière et son dégagement.
Rendre l’équipement visible. Nombre d’animaux sauvages possèdent une pointe d’activité à l’aube, la nuit ou lorsque les conditions météorologiques sont mauvaises : ces conditions affectent leur perception visuelle. Une bonne visualisation de l’obstacle peut être obtenue par l’emploi de fils et de piquets spécifiques, ou par l’attache d’éléments volants au vent. Les matériaux réfléchissant ou restituant la lumière sont à conseiller. Une zone dégagée, de part et d’autre des lignes, rendra la clôture bien visible.
Démontage. En arrière-saison, le retrait des lignes ou leur mise au sol est recommandé afin que l’animal sauvage, n’apprenne pas à ramper dessous ou à passer au travers de l’équipement.
Verticalité, profondeur. Les animaux sauvages considèrent une clôture comme un obstacle à franchir soit en sautant, soit en passant par-dessous. Chaque animal ayant un mode comportemental qui lui est propre, la délivrance du choc électrique privilégiera la tête ou toute autre zone sensible, toujours dans le seul but de mémoriser contact et douleur, avec un réflexe de recul immédiat.
Trois approches
peuvent Provoquer l’hésitation du prédateur

1 • La double clôture implantée devant une clôture principale. La barrière est élargie de telle sorte que le prédateur a du mal à apprécier l’effort à fournir. Concernant la profondeur de l’obstacle : deux ou trois lignes suffisent, implantées à 50 cm de la clôture principale.
2 • La barrière inclinée vers l’animal. La verticalité est floue et décourage les animaux. Le but étant de laisser l’approche se faire puis d’obliger le lever de la tête pour le contact.
3 • La clôture décalée. Un ou plusieurs fils seront excentrés sur des supports (écarteurs) en extérieur du parc. Cette construction affecte la perception de pénétration de l’obstacle. Une seule ligne déportée et positionnée au niveau des 2/3 de la hauteur de l’animal prédateur est efficace.
Particularités selon les espèces. Il est bon de tenir compte du pelage plus ou moins fourni et de sa fonction isolante. Mais les ours, par exemple, sont facilement bloqués par une clôture électrifiée : la surface de leurs pieds assure un bon contact au niveau du sol. Trois ou quatre fils suffisent.
Le loup ou le renard peuvent pénétrer une barrière en creusant sous le fil inférieur, s’il est trop haut. Aussi est-il important soit de niveler, soit d’adapter la hauteur du premier fil à la configuration du terrain.
Le lynx saute la barrière s’il y a des reliefs plus élevés à proximité.
Les bois des cervidés sont isolés, comme les poils dont sont pourvus les sangliers : pour eux, il est bon de privilégier les clôtures décalées ou inclinées vers l’intérieur de la surface à préserver.
Tout animal, domestique ou sauvage, arrive à respecter une clôture électrique : mais il faut laisser du temps au prédateur pour étudier la clôture et avoir un équipement efficace, capable de fournir une décharge électrique assez forte afin d’imprimer la réaction de crainte.
Recommandations. Impact paysager, impact sur le multi-usage et la circulation, impact sur la faune sauvage et sur ses déplacements… la mise en place de clôtures a une incidence sur l’environnement.
Il faut savoir que, sur les lieux de promenade, les panneaux avertisseurs « clôture électrique » sont obligatoires tous les 50 m.
Par ailleurs, les filets électrifiables constituent des pièges pour la faune sauvage : les chevreuils mais aussi les batraciens, les hérissons restent prisonniers des mailles et meurent sous les impulsions électriques.
Les fils de fer barbelés sont sources de blessures, rappelons qu’il est strictement interdit de les électrifier (point BB2 de l’annexe normative BB à la norme 2002 NF EN 60335-2-76 de février 2001 et de son amendement A1 de mars 2002).
Lors de la pose ou du retrait de clôtures, les débris, les fils laissés au sol constituent un danger d’absorption pour l’animal et sont sources de chutes, de blessures.
Limiter le passage des fils électrifiés proches d’un abreuvoir, au-dessus d’un cours d’eau : il y a danger d’électrocution.
Évitez les fils détendus dans lesquels votre bétail risque de rester prisonnier.