PAS-DE-CALAIS

Le département au chevet de la nature ordinaire

 

Espaces naturels n°68 - octobre 2019

Le Dossier

Propos recueillis par Anne Perrin

Un schéma départemental des espaces naturels peut prendre en compte la biodiversité dans toutes ses dimensions. Interview de Yannick Dirryckx, chef du service des espaces naturels et de la randonnée au département du Pas-de-Calais

Les itinéraires de randonnnées bénéficient d'un plan de gestion différenciée. © Éric Desaunois

Les itinéraires de randonnnées bénéficient d'un plan de gestion différenciée. © Éric Desaunois

En quoi le Schéma départemental des espaces naturels du Pas-de-Calais (Sden 62) est-il original ?

Contrairement à nombre d’autres départements, nous avons axé ce schéma sur l’ensemble des compétences du département, et pas uniquement sur les espaces naturels sensibles. Tous les lieux dont le département est gestionnaire ou propriétaire (voirie, bâtiments, collèges, itinéraires de promenade et de randonnée, etc.) sont pris en compte. Par exemple, nous avons choisi d’intégrer les nombreux chemins de randonnées situés sur d’anciennes voies ferrées que nous gérons au Sden, dans une optique de trame verte. Autre originalité, le département contribue à la dimension environnementale des projets des territoires (intercommunalités, communes), avec un « fonds d’intervention en faveur des enjeux écologiques territoriaux ». Ce fonds, doté de 250 000 euros par an, est une subvention aux porteurs de projets qui ont un impact direct sur la biodiversité. Il vient en appui à de petites structures n’ayant pas accès à d’autres financements (comme les fonds européens de développement régionaux). Une fois par an, nos élus examinent les dossiers dans l’objectif de soutenir les projets ayant une réelle plus-value en ce qui concerne la biodiversité, et en particulier la biodiversité ordinaire. Entre 2018 et 2019, une soixantaine de projets ont bénéficié du fonds, à l’instar de petites communes accompagnées pour poser des nichoirs à hirondelles et chiroptères ou encore aménager des terrils de façon écologique, etc. Parallèlement nous avons mis en place un fonds d’initiative pour l’environnement doté de 15 000 euros annuels pour accompagner les associations engagées dans la mobilisation et l’action citoyenne pour l’environnement (chantiers participatifs, par exemple). Un certain nombre d’associations locales sont actives, mais le secteur a besoin de structuration et d’accompagnement pour plus de dynamisme.

Vous avez créé la plateforme Ingénierie 62 en 2018. De quoi s’agit-il ?

Ingénierie 62 est un réseau de partenaires publics mis au service des collectivités territoriales, depuis l’élaboration d’un projet jusqu’à sa mise en œuvre technique en passant par la recherche de financement. À cette fi n, la plateforme met à disposition des collectivités territoriales ingénierie, ressources documentaires, partages d’expérience, etc. Via Ingénierie 62, les élus du département souhaitent favoriser l’émergence de projets, encourager les investissements et renforcer l’action publique. Si le développement durable et l’environnement sont des sujets cibles, tous les champs d’intervention sont visés. Nous souhaitons accompagner au mieux les porteurs de projet. Une commune du bassin minier par exemple, a sollicité une aide pour un projet de reconquête de friche industrielle.

La nature ordinaire a été la grande oubliée des politiques locales. On constate un regain d'intérêt des politiques...

En effet, la nature ordinaire a longtemps été oubliée des politiques locales. Pour autant, le département du Pas-de-Calais intervient depuis plusieurs années déjà dans ce domaine avec une gestion différenciée des bords de routes départementales. Cette année, nous avons mis en place des plans de gestion différenciée sur des itinéraires de randonnées sur d’anciennes voies ferrées, propriétés départementales. Les deux fonds que je viens de présenter permettent de s’intéresser à cette nature ordinaire oubliée. Nos élus ont pour stratégie de s’inscrire dans des niches où aucune autre structure ne s’insère, dans l’idée de valoriser le territoire. On pense tourisme, approche paysagère et, par ricochet, attractivité et développement économique des territoires. Au vu des propositions de projets que nous recevons, j’ai l’impression que les choses évoluent. Nous répondons à une véritable demande territoriale pour prendre en compte et protéger la biodiversité sur des territoires ruraux où dominait jusqu’alors une forme d’ignorance, avec l’illusion, du fait de la nature environnante, que la biodiversité n’était pas menacée…