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Responsabilité dégagée

 

Espaces naturels n°3 - juillet 2003

Le Dossier

Chantal Gil
Spécialiste en droit public

 

Sur le sentier du littoral, quelqu’un fait une chute et se blesse. Le propriétaire public est-il responsable ? Au Cap Taillat, la responsabilité du Conservatoire du littoral n’a pas été retenue car l’ouvrage public était normalement entretenu.

Pour se rendre à la plage de l’Escallet au Cap Taillat (Ramatuelle), madame X emprunte un sentier situé dans un site naturel appartenant au Conservatoire du littoral. Ici, la côte est rocheuse et présente des passages escarpés. Madame X fait alors une chute et se blesse à la cheville. Elle saisit le tribunal administratif et sollicite condamnation du Conservatoire du littoral à lui payer la somme de 15 245 euros en réparation du préjudice subi. Dans son jugement en date du 11 décembre 2001, la juridiction administrative déboute la plaignante après avoir établi les critères permettant de déterminer si le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres entretient normalement ou non le sentier qualifié d’ouvrage public. En l’état de la jurisprudence, ces critères sont applicables à tout propriétaire public. Ils « balisent » en quelque sorte les exigences jurisprudentielles pour définir ce qu’est l’entretien normal d’un ouvrage public en site naturel. Avant de revenir sur les critères d’entretien tels que définis par le tribunal, retenons tout d’abord qu’un ouvrage est considéré comme public dans la mesure où il fait partie du domaine public et où il est destiné à être ouvert au public. Dans le cas qui nous occupe, madame X est usagère de l’ouvrage public. Le Conservatoire du littoral se doit d’assurer un entretien normal dudit ouvrage à savoir les sentiers, du fait de leur accès au public.
Trois critères à retenir
L’entretien a été estimé comme normal du fait du respect de trois critères : une communication efficace, une information suffisante qui précise la nature des risques encourus et une surveillance du site. En l’espèce, des panneaux d’information sont implantés au point des départs des sentiers. Ils indiquent les risques que peuvent prendre les promeneurs et précisent que les sentiers des criques présentent des passages difficiles. Le tribunal a estimé que cette signalisation, en place depuis nombre d’années permettait de délivrer une information suffisante. Par ailleurs, le Conservatoire du littoral fait procéder à la surveillance du site par un garde assermenté.
Le tribunal n’a pas retenu le grief de madame X qui reprochait au Conservatoire l’absence de dispositif de protection aux endroits escarpés (rampes). Les juges estimant que celle-ci devait s’attendre à trouver sur ce sentier un « relief naturel et parfois accidenté » et qu’elle aurait dû adopter un comportement empreint de vigilance.
En conclusion, retenons que pour ne pas encourir de responsabilité, il convient d’anticiper. Et, afin de pouvoir faire la démonstration des trois éléments précités, il vaut mieux s’armer de preuves : photos, constats d’huissier, rapports d’activités des gardes. Se souvenir aussi que le tribunal a statué en rappelant l’évidence, à savoir que la nature est source de plaisir mais aussi de danger…