Partenariats

La biodiversité, un engagement de la Défense

 

Espaces naturels n°53 - janvier 2016

Gestion patrimoniale

Perrine Paris-Sidibé et Pascal Faverot, Cen Rhône-Alpes.
http://www.lifeterrainsmilitaires.fr

Si l’activité militaire reste prioritaire sur les camps, la préservation de la biodiversité constitue l’une des préoccupations de premier ordre au sein du ministère de la Défense, le MINDEF. De nombreux partenariats concrétisent des projets de gestion des terrains militaires en faveur des espaces naturels.

Un sixième des propriétés du ministère de la Défense sont classées Natura 2000

Un sixième des propriétés du ministère de la Défense sont classées Natura 2000 © Life Defense natur 2mil

Les terrains militaires sont des sites préservés de l’urbanisation et de l’agriculture intensive, et de précieux réservoirs de biodiversité. Leur volonté de favoriser la biodiversité est donc une bonne nouvelle pour les protecteurs de la nature. On recense déjà l’intégration de 42 000 hectares au réseau Natura 2000, soit un sixième des terrains propriétés du MINDEF. De plus, un troisième protocole d’accord a été signé en 2013 entre les ministères chargés de l’Écologie et de la Défense. En 1997 a été officialisé le premier partenariat entre l’Armée et un Conservatoire d’espaces naturels sur le camp de Montmorillon, en Poitou-­ Charentes : plan de gestion construit en concertation, restauration de landes, suivi des circaètes...

Aujourd’hui, plus d’une trentaine de conventions ont été signées ce qui représente 44 % des surfaces gérées par les Cen en France et le premier partenaire en nombre d’actes. Le colonel Gariel, chef d’état-major de l’EMZD Lyon, dans l’introduction d’un séminaire national en 2014, affirmait « le rapprochement entre naturalistes et militaires n’est pas contre nature ! » Une des raisons essentielles du succès de cette collaboration repose sur une démarche portée à l’échelon local entre camps militaires et Cen, fondée sur le dialogue et la confiance, dans le respect des compétences de chacun. Raphaël Grimaldi, du Cen Poitou­ -Charentes, évoquait à ce sujet  : « la conduite du partenariat demande un dialogue constant avec de la franchise et le respect des préoccupations de chacun. Ce dialogue avec les militaires permet de trouver des solutions techniques sur le terrain ». Cette réussite repose aussi sur des projets adaptés à chaque situation locale, sur la base d’un diagnostic partagé.

Enfin, l’expertise et le savoir-faire des Cen, notamment dans leur capacité à mobiliser des financements pour mener à bien les projets, sont les clés de partenariats durables conciliant la vocation opérationnelle militaire avec une meilleure prise en compte de la biodiversité.

DU LOCAL À L’EUROPÉEN

Adapter la gestion de camps est un premier pas. Il était néanmoins nécessaire de donner une autre ampleur aux préoccupations communes et inciter à la démultiplication des partenariats. Aussi, le Cen Rhône-Alpes et le MINDEF se sont alliés avec les Cen Corse et Paca ainsi que le syndicat mixte des gorges du Gardon pour mettre en œuvre un projet Life nature sur quatre sites : les camps de Chambaran (Isère) et des Garrigues (Gard), la base navale d’Aspretto (Corse) et l’ancien site militaire du Mont-Caume (Var).

Des actions transversales d’envergure nationale complètent cette panoplie de terrain d’action. Un premier enjeu : sensibiliser à la biodiversité des terrains militaires. Pour cela, des affiches ont été créées montrant la proximité des deux professions, des antennes de transmission à celle des longicornes, des gros porteurs aux petits chasseurs, des chenilles... aux papillons. Une bande-dessinée documentaire est aujourd’hui en diffusion sur le territoire national. Pour favoriser l’émergence de nouveaux programmes, les moments d’échanges s’intensifient, s’élargissent progressivement à divers pays européens, ainsi que l’US Army.

UN PARTENARIAT AVEC SURTOUT DES HAUTS

Le MINDEF n’a pas attendu pour déployer des partenariats plus ciblés avec d’autres opérateurs présents sur le terrain : ONF, LPO, ONCFS, Conservatoire du littoral et UNAF. Outre la gestion du domaine boisé des terrains militaires par l’ONF, qui met l’accent sur la prise en compte de la biodiversité dans la sylviculture, ou encore la gestion cyné­ gétique du domaine militaire par l’ONCFS, même les abeilles bénéficient de leur propre protocole. En effet, le dernier partenariat signé par le MINDEF, en 2011 avec l’Union nationale de l’api­ culture française, aboutit aujourd’hui à la présence de près de 2 500 ruches sur les emprises du ministère.

La mise en œuvre sur le terrain n’est toutefois pas facile au quotidien, l’activité militaire ne permettant pas au gestionnaire d’intervenir comme bon lui semble. Tisser une relation de confiance et comprendre qui sont les bons interlocuteurs sont un préalable. Planifier les éventuels travaux longtemps à l’avance et valider leur faisabilité la veille avec le chef de camp sont aussi nécessaires. Enfin, en cas de travaux lourds, il est préférable d’avoir anticipé avec une bonne étude pyrotechnique et éviter ainsi les accidents. Sur ce plan, le Cen Rhône-Alpes rédige avec le MINDEF un guide pratique sur la bonne gestion des risques pyrotechniques dans les projets environnementaux sur emprises militaires, un document qui sera en diffusion au premier semestre 2016.