Stratégie

Planifier mais rester souple

 

Espaces naturels n°60 - octobre 2017

Le Dossier

Les Conservatoires d'espaces naturels d'Auvergne-Rhône-Alpes

Une bonne anticipation peut-elle se faire dès l’élaboration du plan de gestion ? Si ce document fixe un cadre, des orientations, trouver les bons créneaux de valorisation de la matière issue des travaux reste une autre affaire ! Trop de rigidité peut faire passer à côté d’opportunités précieuses pour l’intégration du projet dans la vie du territoire ou limiter les chances d’offrir une seconde vie au produit.

La fabrication de mini-balles rondes, pratiques à manipuler, ouvre des perspectives intéressantes en termes d’usages locaux.

La fabrication de mini-balles rondes, pratiques à manipuler, ouvre des perspectives intéressantes en termes d’usages locaux.

En Auvergne-Rhône-Alpes, cette préoccupation n’a cessé de se structurer, apportant son lot d’idées nouvelles, incitant parfois à l’amélioration des technologies en collaboration avec des entreprises. De nouvelles dynamiques sont ainsi générées et l’effort permanent d’anticipation des Conservatoires d'espaces naturels y est pour quelque chose. L’expérience montre toutefois que la planification ne peut être maximale, l’opportunisme reste important.

L’ÉTÉ PROPICE À LA PROGRAMMATION

L’opérateur transcrit les orientations fournies par le plan de gestion en prescriptions opérationnelles en s'appuyant sur les potentialités du territoire, ceci plutôt l’année qui précède les travaux. Que deviendra cette matière ? Cette question va le guider sur l’état en sortie (balles rondes ou foin en vrac, bûches de 50 cm pour les cheminées ou rondins d’1 m pour reconstruire un sentier) et donc dans le matériel à utiliser. Bien sûr, dans cette phase de programmation les conditions d’accès à la parcelle, la portance des sols ou encore la période d’intervention seront autant de contraintes à prendre en compte, restreignant parfois de manière drastique les solutions. Le travail consiste à adapter les solutions techniques au contexte local, si besoin à faire émerger une technologie nouvelle.

Mais attention, les solutions pour mieux valoriser cette matière peuvent parfois diverger avec l’objectif du plan de gestion et générer ainsi des dilemmes entre des enjeux socio-économiques et écologiques. 

L’APPROPRIATION LOCALE EST LE MAÎTRE MOT

Saisir l’opportunité, c’est s’adapter aux besoins locaux, susciter de nouvelles perspectives, éveiller la curiosité. C’est important dans la longue vie du projet ! En Isère, le foin grossier est proposé gratuitement en libre service (deux-mille ballots/an) en bord de parcelle, aux jardiniers, éleveurs, collectivités... Une partie de ces matériaux est travaillée spécifiquement pour des tests en permaculture. Dans le Rhône, sur le marais de Boistray, après quelques années de tâtonnement, la planification
prend maintenant la forme d’un tableau offre/demande en mini-balles rondes, l’intégralité de la production étant fournie aux maraichers et viticulteurs pour lutter contre l’érosion des sols et limiter l’évapotranspiration.
Une fenaison tardive a été fournie à une société souhaitant réensemencer un site avec de la graine « locale ». Une meilleure anticipation aurait probablement orienté la technique vers l’obtention de balles rondes moins lourdes à dérouler manuellement.

Les enjeux d’appropriation locale peuvent passer au second plan, en même temps que les circuits courts à faible bilan carbone, les bonnes intuitions et la « débrouille », du fait de contraintes administratives (par exemple les marchés publics).

Il faut donc anticiper mais garder de la souplesse, réajuster si besoin, mettre en réseau les acteurs... Un pas en avant vers l’appropriation du projet par les locaux, jamais acquise, et vers une participation active à la vie économique du territoire