Conservatoire d’espaces naturels de l’Ariège

Depuis Fréquence grenouille, on entend coasser dans les mares de Tourtouse

 
Pédagogie - Animation

Carole Herscovici
Conservatoire d’espaces naturels de l’Ariège

Se mobiliser pour des grenouilles ! Et découvrir toute l’importance des zones humides. Oui, c’est possible.

Le projet n’a pas fait l’unanimité parmi tous les habitants de Tourtouse (Ariège), mais il a fait mouche, défend Carole Herscovici, animatrice au Conservatoire des espaces naturels d’Ariège. Il a fait parler des mares et de leurs habitants, comme jamais auparavant. On s’est même disputé pour déterminer à qui appartenait la responsabilité de leur sauvegarde : chasseurs, riverains, écolos ou élus ? »

Pas gagné. Portée par le réseau des conservatoires d’espaces naturels depuis presque deux décennies, et rejoins depuis 2008 par Réserves naturelles de France, l’opération Fréquence grenouille n’était pas gagnée d’avance1. Qui aurait parié à l’époque sur l’intérêt du grand public pour les amphibiens et sur le fait qu’ils puissent être des ambassadeurs des milieux humides ? Après six années de participation à cette campagne de sensibilisation du grand public, l’animatrice tire des leçons : « Pour une réelle mobilisation du public, deux facteurs nous apparaissent essentiels : travailler à petite échelle et faire en sorte de provoquer une participation active du public. » En effet, elle développe  : « La taille du territoire est fondamentale. Le public connaît son environnement proche, il peut ainsi en capter tout l’intérêt. Vous savez, la période des migrations printanières des amphibiens peut être spectaculaire. L’importance des points d’eau dans le cycle vital de ces animaux apparaît alors comme une évidence. En animant ces journées Fréquence grenouille, nous avons interrogé les habitants sur les mares de leur commune, sur les secteurs de concentration de grenouilles ou crapauds qu’ils connaissaient. Nous avons parié que cette participation inciterait les habitants à agir. » C’est bien ce qu’il advint. Attristés par le massacre saisonnier de centaines de batraciens sur un tronçon de route proche d’une grande mare, des riverains ont interpellé le conservatoire pour envisager une solution. « Nous les avons juste accompagnés. » Par chance, le tunnel souterrain destiné à l’évacuation du trop-plein de cette grande mare passait sous la route meurtrière et pouvait servir de crapauduc. Après concertation des riverains, le choix a été fait d’installer une barrière provisoire le long de cette route. Cet obstacle permettait de canaliser les batraciens migrants, mus par la coassante période des amours, vers le souterrain.

Boule de neige. D’autres participants enthousiastes se sont joints au projet. Les enfants notamment, conduits par les animateurs du centre de loisirs et de l’association Envol de Sainte-Croix Volvestre. Ils ont réalisé et installé des panneaux pour prévenir les automobilistes. Ajoutons à cela, et ce n’est pas le moindre en termes d’ambiance, une animation nocturne destinée à observer le bon fonctionnement du dispositif, élue meilleure soirée de l’année par les enfants de ces associations. À Tourtouse, Fréquence grenouille aura permis de limiter sensiblement le nombre d’individus écrasés. Attirés par les chants des mâles qui faisaient écho dans le souterrain, ce sont des centaines d’individus (crapauds communs, grenouilles agiles, rainettes méridionales, salamandres communes, tritons palmés) qui ont emprunté le tunnel de l’amour, sains et saufs !

1. L’opération se déroule du 1er mars au 31 mai. Elle compte plus de 400 animations et plus de 10 000 participants.