Prévenir l’érosion de la biodiversité implique de mener des actions sur l’ensemble des territoires, des espaces naturels remarquables aux espaces plus anthropisés. Ainsi, si la préservation des zones naturelles est une nécessité pour tenter d'enrayer la perte de biodiversité qui s’accélère, les espaces golfiques ont un rôle à jouer et peuvent accueillir une biodiversité souvent méconnue mais qui mérite d’être reconnue. Fin 2015, la Fédération française de golf (ffgolf) et le Muséum national d’Histoire naturelle (UMS PatriNat) ont mis en place un partenariat visant à développer une démarche globale de prise en compte de la biodiversité dans les golfs en France. Un des axes majeurs de ce partenariat est la construction d’un outil pour la connaissance, la préservation, l’amélioration de l’état et la valorisation du patrimoine naturel des golfs : le Programme Golf pour la biodiversité (PGB)¹, officiellement lancé début 2018. Cette démarche succède à différentes initiatives menées localement par des associations de protection de la nature telles la LPO (cf. encadré), des Parcs naturels régionaux comme le PNR Oise-Pays de France², des Conservatoires d'espaces naturels, etc.

UNE BIODIVERSITÉ MÉCONNUE

L’image du green tondu peut laisser perplexe quant aux capacités des golfs à abriter de la biodiversité. Les naturalistes qui ont eu l’occasion d’entrer au coeur d’un golf savent que ces espaces peuvent abriter, en contact avec les zones de jeu proprement dites, une diversité surprenante de milieux naturels et semi-naturels qui peuvent jouer un rôle dans les continuités écologiques, rôle particulièrement important en contexte urbain. Prairies, mares, cours d’eau, bassins, espaces boisés, zones sableuses et enrochements peuvent ainsi se dévoiler à qui prend le temps de les observer. À cette diversité d’espaces s’ajoute une grande diversité d’espèces. En 2016, plus de 350 espèces ont été observées sur le Golf national (78) suite à la mise en place d’une méthodologie semi-standardisée d’évaluation écologique, l’Indicateur de qualité écologique (IQE)³, et de relevés opportunistes terrestres⁴et subaquatiques. Au total plus de 750 données de présence/d’occurrence de faune, flore et fonges ont été intégrées à l’Inventaire national du patrimoine naturel (INPN) pour ce parcours. Ce diagnostic écologique a également permis d’identifier des zones à enjeux pour la biodiversité et de proposer des préconisations d’aménagement et de gestion pour une meilleure conservation des espèces et des milieux observés.

Réduction des tontes et désherbage manuel contribuent à une gestion écologique des golfs, favorable à la biodiversité.
Crédit : Océane Roquinarc'h

RÉVÉLER LE PATRIMOINE NATUREL DES GOLFS

Mieux connaître et intégrer la biodiversité dans les espaces golfiques pour mieux la préserver et la valoriser, et sensibiliser le plus grand nombre aux enjeux écologiques, tels sont les objectifs du PGB. Ils sont en lien direct avec l’évolution de la gestion des parcours de golfs. Mieux comprendre les actions favorables à la préservation de la biodiversité permet une meilleure acceptation de ces dernières par les golfeurs et les équipes d’entretien. C’est un gage de réussite indispensable pour maintenir ces actions sur le long terme. Ce programme est aussi une opportunité pour nouer des partenariats locaux constructifs entre les clubs et les acteurs de la biodiversité. Les structures naturalistes (associations naturalistes, bureaux d’études, acteurs de la gestion des espaces naturels, ONG, etc.) sont sollicitées pour accompagner les golfs dans cette démarche. Ce sont elles qui réalisent les expertises naturalistes et les diagnostics écologiques afin de proposer aux golfs les préconisations de gestion adaptées.

En 2016, plus de 350 espèces ont été observées sur le Golf national (78) suite à la mise en place d’une méthodologie semistandardisée d’évaluation écologique.

En s’engageant dans le programme, les golfs volontaires, accompagnés par les structures naturalistes, pourront ainsi révéler et partager les richesses naturelles présentes sur leurs parcours et les valoriser au travers de trois niveaux de labellisation (bronze, argent, or). Plusieurs documents ont été déclinés pour chaque niveau, parmi lesquels une plaquette de présentation « Participez au programme », une lettre d'engagement, un questionnaire « état des lieux », un mode d'emploi à destination des clubs et un document de cadrage méthodologique et technique à desti nation des structures naturalistes. Les golfs engagés dans le PGB adhèrent nécessairement au principe de partage des données récoltées sur le foncier des golfs afin de les intégrer à l’INPN et les rendre accessibles. Pour garantir une homogénéisation des livrables, un modèle de rapport d’expertise et un tableau de saisie des données naturalistes sont également proposés. Ces outils permettent d’alimenter une base de données nationale sur la biodiversité des golfs. Par ce processus, le MNHN pourra ainsi analyser et rendre compte du patrimoine naturel qui s’exprime sur les golfs français. Les premiers résultats de cette année de lancement sont positifs : 26 clubs sont actuellement inscrits dans le PGB, parmi lesquels 16 clubs au niveau bronze, dont huit ayant obtenu la labellisation en équivalence pour des travaux qu’ils avaient engagés avant la mise en place du PGB, comme certains golfs Blue Green accompagnés par la LPO (voir encadré), et 10 clubs au niveau argent.

La réussite de la transition écologique du golf se fera nécessairement par la sensibilisation des golfeurs et des gestionnaires des parcours aux enjeux écologiques. 2018 est l’année du lancement et de la mise en place d’une communauté de pratiques visant à partager les retours d’expériences entre les clubs engagés dans le PGB et plus largement. Plusieurs axes sont à poursuivre pour le déploiement de ce programme dans les années à venir : l’accompagnement des clubs et de diverses structures naturalistes, l’amélioration des méthodes d’évaluation de la biodiversité dans les espaces golfiques, la gestion et l’analyse des données naturalistes pour valoriser et communiquer les résultats, et enfin développer le programme à l’Outre-mer et à l’international.

Les auteurs remercient Philippe Gourdain (MNHN) et Thomas Charrier (FFGOLF)

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(1) bit.ly/2LbArvt 
(2) Cf. étude publiée en 2013 sur le sujet : bit.ly/2MFYc0j 
(3) « L’IQE : un indicateur de biodiversité multi-usages pour les sites aménagés ou à aménager ». Revue d’écologie, vol 68. pp. 105-119. Delzons, O., Gourdain, P., Siblet, J.P., Touroult, J., Herard K., Poncet, L., 2013 http://iqe-spn.mnhn.fr/ 
(4) Évaluation de la biodiversité des sites de la Fédération française de golf : indicateur de qualité écologique du golf national, 2016. Roquinarc’h O., Lacoeuilhe A., Gourdain P., 2017 Service du patrimoine naturel, MNHN, Paris. 186 pages. bit.ly/2vM0Q7y