ENVIRONNEMENT

Préserver et aménager : les départements en première ligne

 

Espaces naturels n°68 - octobre 2019

Le Dossier

Alix Mornet, conseillère environnement à l’Assemblée des départements de France, alix.mornet@departements.fr

Les départements ont un rôle spécifique en matière de biodiversité via leur compétence en matière d’Espaces naturels sensibles (ENS). Ils doivent remplir deux objectifs : préserver la qualité des sites, des paysages, des milieux naturels, et les rendre accessibles au public.

Source : Enquête 2017 de l'Assemblée des Départements de France

Source : Enquête 2017 de l'Assemblée des Départements de France

Les conseils départementaux déterminent les espaces naturels à protéger sur leur territoire en fonction d’enjeux environnementaux. Ils peuvent soit acquérir directement ces espaces par préemption, soit les protéger par le biais d’une convention avec le propriétaire du site. Dès lors, ces sites deviennent des espaces naturels sensibles.

UNE CHARTE, 400 000 HECTARES PRÉSERVÉS

Adoptée en 2006 par l’Assemblée des départements de France la « Charte des espaces naturels sensibles1 » vise à assurer une cohérence des politiques départementales et favoriser la mise en place de schémas départementaux des ENS définissant les objectifs et moyens d’intervention à court et à long terme. Elle précise notamment la possibilité de financer les études, les personnels dédiés, les actions d’animation, de communication, d’éducation et de sensibilisation à la politique des ENS. À ce jour, près de 60 départements ont signé cette charte, et l’on compte environ 400 000 hectares préservés. Un enjeu important est de faciliter l’accessibilité, afin de faire partager à tous les attraits naturels d’un territoire. Les ENS sont des lieux privilégiés de découverte de la nature et de développement des activités de loisirs et de tourisme en s’appuyant sur une gestion raisonnée des territoires.

TRANSVERSALITÉ ET PARTENARIATS AU QUOTIDIEN

Outils transversaux, les ENS interviennent en soutien d’autres politiques publiques menées par les départements. Naturellement, la valorisation des paysages, reflet de l’identité culturelle locale, est un axe fort de la politique de préservation. De la même façon, l’éducation à l’environnement est primordiale. Ainsi, de nombreux départements sensibilisent le grand public, et plus spécifiquement les scolaires, à la préservation de l’environnement et de la biodiversité, par la mise en place de visites de sites et de programmes pédagogiques. Maintenir l’agriculture fait également partie des préoccupations de nombreux départements qui concluent des conventions de gestion avec les exploitants agricoles, afin d’entretenir certains ENS. Les départements soutiennent un important réseau d’acteurs de la biodiversité comme le Conservatoire du littoral, les conservatoires d’espaces naturels, les réserves naturelles de France, les parcs naturels régionaux, les communes et intercommunalités, les agences régionales de la biodiversité. Ils accompagnent également des programmes de protection comme les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) de la PAC, les Contrats territoriaux milieux aquatiques (CTMA), l’initiative Territoires engagés pour la nature (TEN) ou encore gèrent des sites Natura 2000… En tant qu’acteurs de proximité, les départements épaulent activement les réseaux associatifs et scientifiques agissant en faveur de la préservation de la biodiversité.

LA TAXE D’AMÉNAGEMENT DES ESPACES NATURELS SENSIBLES : LEVIER EFFICACE MAIS FRAGILISÉ

Les départements ont la possibilité de lever la part départementale de la taxe d’aménagement affectée aux ENS (TAENS). La dernière enquête conclut à un bon taux de consommation de cette taxe (plus de 100 % sur les trois dernières années de références). D’ailleurs, un rapport gouvernemental prévu dans le cadre de la loi Biodiversité devrait être transmis au parlement prochainement sur ce sujet. Cependant, depuis 2018, une contrainte majeure pèse sur toutes ces politiques. Bien que bénéficiant d’une recette spécialement affectée à la biodiversité, les départements sont bridés par le dispositif des pactes financiers prévus par le gouvernement. Concrètement, les départements disposent de moyens pour mener des politiques ambitieuses en matière de biodiversité, mais n’ont pas le droit de les utiliser ! Tous les freins en faveur de la reconquête de la biodiversité ne sont donc pas encore levés…

(1) Téléchargeable sur www.departements.fr