Préparer la négociation

Dialogue, échanges, tractations… Quels sont les arguments qui portent ?

 

Espaces naturels n°1 - janvier 2003

Le Dossier

Yann Laurans
Membre du cabinet AScA (application des sciences de l’action) au moment de la recherche • Actuellement responsable du pôle prospective et évaluation, agence de l’eau Seine Normandie

 

Souvent, les acteurs des sites naturels doivent obtenir la coopération d’interlocuteurs économiques et administratifs. Ils doivent les rallier à leur cause.
Mais le dialogue n’est pas toujours aisé quand l’autre est issu d’une culture dissemblable ; que son langage, ses arguments, sa structure mentale diffèrent. Du coup, se pose la question du « comment convaincre », comment développer des arguments susceptibles de mobiliser d’autres acteurs locaux ?
La recherche originale menée par AScA en collaboration avec le Conservatoire du littoral, se propose de « disséquer » les négociations pour la mise en œuvre d’opérations de re-création. Elle veut comprendre quels sont les arguments qui portent, et percevoir, notamment, le poids des arguments économiques dans la négociation. Ce faisant, cette démarche épouse un domaine scientifique émergeant, à la croisée de la sociologie, de l’économie et des sciences politiques.
Généralement, les chercheurs utilisent une grille pour observer une négociation, en réaliser le compte rendu, puis l’analyse. Ici, ils ont effectué 58 entretiens qualitatifs auprès de presque tous les délégués du Conservatoire du littoral et des acteurs des négociations considérées.
Les sciences humaines ont ceci de particulier qu’elles forcent l’apprenant à se mettre en situation de risque pour apprendre. Cette étude n’échappera pas à la règle. On peut bien sûr, tranquillement, s’approprier les résultats et lire que deux types de dynamiques argumentaires s’affrontent : une première laisse une large place à la mise en valeur des écosystèmes ; la seconde s’articule autour d’arguments économiques et commerciaux qui peuvent être associés à une logique de jardin ou d’entreprise de loisirs. Il y a même la place pour un argument de consensus qui véhicule une représentation très humanisée de la nature, représentée comme un capital pour l’activité locale. Cette lecture peut laisser un vague sentiment de portes déjà ouvertes. Il en est bien autrement si on accepte de se laisser interpeller par les chercheurs qui pointent du doigt les lacunes des acteurs de la négociation dans l’argumentaire économique. Et voilà qu’ils livrent, tel quel, un lot de questions (ci-dessous) dont chacune représente une suggestion d’investigation permettant d’alimenter sa propre négociation et peut-être d’en améliorer les conditions générales. Si le cœur vous en dit…