Évolution des métiers : accompagner l’acquisition de compétences

 

Espaces naturels n°29 - janvier 2010

Management - Métiers

Anne Killi
Consultante Ingéniors

D’autres exigences, d’autres besoins et un autre contexte juridique : comment faire évoluer les métiers de la nature ?

Les métiers de la nature évoluent. La loi d’avril 2006, qui régit les parcs nationaux de France par exemple, élargit leurs pouvoirs de police, institue une responsabilité de développement territorial, crée une obligation de partenariat avec les communes. Elle déclenche la renégociation du périmètre du parc et génère des conséquences sur les métiers et compétences.
Trois outils principaux permettent d’accompagner cette évolution : la stratégie métiers/compétences, le plan de formation, le dialogue sur les compétences.

Stratégie métiers/compétences. La stratégie métiers/compétences vise à dégager les priorités sur les compétences ou métiers à développer ou désinvestir. Définir cette stratégie consiste en fait à privilégier un scénario d’évolution de l’organisation et des compétences attendues équipe par équipe ou poste par poste.
Dans les parcs cette réflexion porte par exemplesur l’organisation des secteurs (entités sur lesquelles s’organisent les missions des agents de terrain) et l’on s’aperçoit que les choix divergent d’un parc à l’autre. 
• Le Mercantour réaffirme la vocation traditionnelle des secteurs : protection, préservation, police.
• La Guadeloupe spécialise des secteurs (marin, terrestre).
• Port-Cros renforce l’autonomie des secteurs et la polyvalence des équipes.
• La Réunion et la Guyane mettent en place un niveau hiérarchique supplémentaire avec des responsables de secteurs auxquels sont confiés des périmètres plus vastes et des équipes d’au moins dix à douze personnes.
Tous ces scénarios cependant, font apparaître une nouvelle fonction dont il convient de définir les missions. Elle se caractérise par un rôle d’interface accru entre le territoire et le siège et une part importante de management d’équipes. 

Plan de formation. Le plan de formation structure et oriente les efforts de formation en articulant les aspirations des agents, les besoins des équipes, la stratégie de l’organisation.
Une première approche du plan consiste à le calibrer en fonction des moyens : budget, disponibilité des agents. Il faudra ensuite passer chaque action de formation possible au crible de trois questions :
• Entre-t-elle dans la stratégie ?
• Ouvre-t-elle de nouvelles possibilités à la fois pour l’organisation et pour les agents (responsabilisation, évolution professionnelle ou stabilité) ?
• Est-elle efficiente (rapport coûts-
bénéfices) ? On mettra ici en évidence, par exemple, que le montage d’une formation/action menée avec des partenaires du parc fera bénéficier les agents d’une ouverture technique, relationnelle mais aussi culturelle.
Les qualités d’un plan de formation résident dans son caractère progressif, dans sa flexibilité, dans sa capacité à générer de nouvelles ressources tant pour l’organisation que pour le développement des compétences (diffusion des supports pédagogiques, transfert de compétences interne, formation de formateurs…).

Dialogue sur les compétences. Certains praticiens conçoivent la compétence comme les éléments permettant de travailler ensemble. Cette façon de mettre l’accent sur la relation de travail comporte beaucoup d’avantages en termes de cohésion, de sérénité, d’efficience. Elle bouleverse cependant nos systèmes de motivation et de rétribution centrés sur la performance individuelle. Aussi, sans aller jusque-là, le dialogue sur les compétences consiste à susciter des échanges manager-agent à partir des activités qui sont confiées à ce dernier et qu’il a menées à bien. Les agents étant intéressés à faire valoir leurs apprentissages réussis et l’amélioration de leurs pratiques, tandis que les managers aiment à sortir d’un système d’évaluation vécu comme un exercice imposé.
La forme concrète de ce dialogue consiste à se saisir des qualités des personnels. Ainsi par exemple, dans tel parc un technicien est passionné par les batraciens, tandis qu’une garde-moniteur aime sensibiliser des écoliers au travers d’expositions qu’elle anime. Leur chef de secteur : 1) vérifiera avec eux que le travail prescrit est réalisé dans de bonnes conditions ; 2) énoncera avec eux les conditions dans lesquelles ses équipiers peuvent investir leurs domaines de prédilection en rejoignant l’intérêt du parc (axes de capitalisation) ; 3) fera le lien avec les autres services afin de faire valoir ces ressources en cours d’élaboration.

Le schéma d’intégration des nouvelles compétences. Les organismes gestionnaires d’espaces naturels devraient pouvoir construire un schéma d’intégration des nouvelles compétences comportant les orientations de recrutement, le plan de formation, les axes de réorganisation. Ce schéma est établi de manière consultative (ou participative) et itérative. Il est articulé sur la stratégie, la charte partenariale et le projet de territoire dans le cas d’un parc. Il s’appuie sur les compétences, motivations et projets professionnels des agents, détectés grâce au dialogue interne.