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Impacts des pollutions diffuses (2) Faune et flore aquatiques

 

Espaces naturels n°56 - octobre 2016

Le Dossier

Olivier Perceval,
chargé de mission « écotoxicologie », direction de l’action scientifique et technique

Même quand les polluants sont présents en faible quantité dans les cours d'eau, leur toxicité peut se révéler importante. Des travaux de recherche sont en cours pour mieux en connaître les effets.

Impacts des pollutions diffuses Faune et flore aquatiques

Hydrobiologie : prélèvements et recherche de macroinvertébrés à l'aide de tamis. © Laurent Mignaux/MEDDE-MLETR

Les substances actives et leurs produits de dégradation sont présents dans le milieu à l’état de mélanges plus ou moins complexes, à des niveaux de concentration généralement faibles à modérés. Une évaluation a priori de la toxicité causée par une co-exposition à plusieurs PPP présentant un même mode d’action, selon un modèle d’additivité, indique néanmoins un risque potentiel vis-à-vis des organismes les plus sensibles, même pour des concentrations individuelles inférieures aux normes de qualité environnementale. Même si les relations de cause à effet entre l’exposition à des PPP et les effets indésirables sur les organismes non-cibles sont difficiles à mettre en évidence sur le terrain, surtout pour des niveaux élevés de l’organisation biologique (populations et communautés), des études récentes montrent néanmoins l’impact négatif de cette classe de contaminants sur la biodiversité aquatique.

De par leurs mécanismes d’action et leurs cibles moléculaires variées, les PPP exercent une toxicité directe qui se manifeste par des réponses biologiques observables aux niveaux moléculaire, cellulaire, physiologique et individuel, depuis l’inhibition de la photosynthèse des algues et des plantes aquatiques par certains herbicides, jusqu’aux effets neurotoxiques des insecticides, en passant par des perturbations du système hormonal des poissons, oiseaux et mammifères inféodés aux milieux aquatiques, et la déficience du système immunitaire des batraciens augmentant leur susceptibilité aux infections.

Les effets directs des PPP peuvent également se propager dans les chaînes biologiques aquatiques notamment en altérant les relations de prédation (herbivores-plantes, prédateurs-proies et hôtes parasites), les relations de compétition intra et interspécifique, et les relations entre les espèces et la qualité de leur habitat. La modification de ces relations écologiques peut se traduire ultimement par des effets sur le fonctionnement des écosystèmes (productivité primaire, décomposition de la litière végétale, variations du pH et de l’alcalinité de l’eau, et des concentrations en oxygène dissous).

À terme, l’évaluation des risques causés par les PPP devra également intégrer les effets du changement climatique susceptibles de modifier leur transfert et leur comportement dans l’environnement aquatique ainsi que leur toxicité, et d’accroître la sensibilité de certaines espèces à un stress chimique supplémentaire.