« Les personnels du groupe Total doivent pouvoir être fiers de leur entreprise »

 
Le Dossier

Bernard Tramier
Délégué de la fondation Total pour la biodiversité

 

La fondation Total intervient dans le domaine environnemental. Vous conviendrez que l’on peut s’interroger sur votre intérêt à agir. Pourquoi l’environnement ? Certains affirment que c’est une manière de redorer votre blason ; d’autres parlent de s’acheter une conscience…
C’est une question très pertinente. Si nous raisonnions en termes de retour sur image, il serait plus sage de s’adonner au mécénat culturel. Il y a sans doute moins de risques, et plus de reconnaissance, de la part de la société tout entière. La fondation existe depuis 1992 et le mécénat environnemental a pour nous un sens profond car nous avons des métiers qui peuvent interférer avec l’environnement.
Quel retour attendez-vous de ce mécénat ?
Nous nous sommes orientés vers ce type de mécénat dès 1992 et sur la demande, très fortement exprimée, de notre personnel. L’impact sur l’environnement de nos activités est une préoccupation du groupe et nos salariés ont une forte sensibilité dans ce domaine. C’est pourquoi, par ce mécénat, nous visons principalement un retour interne. D’ailleurs, une partie du budget de la fondation est consacrée à des projets environnementaux qui nous arrivent d’un employé, d’une filiale ou d’une usine du groupe. D’une certaine manière, on peut dire qu’un des enjeux du mécénat est de développer la
culture d’entreprise dans ce domaine. C’est pour cette raison aussi que nous organisons des rencontres entre les personnels et des scientifiques et que nous nourrissons un site intranet très consulté.
Comment choisissez-vous vos partenaires ?
Nous nous attachons particulièrement à leur notoriété scientifique. Sur ce plan, les programmes que nous soutenons doivent être irréprochables. Par ailleurs, nous voulons travailler sur le long terme et nouer des relations de confiance. Aujourd’hui, nos deux partenaires principaux sont le Parc national de Port-Cros et le Conservatoire du littoral avec lesquels nous avons des programmes pluriannuels depuis douze et quinze ans. Le Parc et le Conservatoire accordent des conditions privilégiées aux employés du groupe qui viennent visiter leurs installations. Ils accueillent également sur leurs sites des réunions d’actionnaires ou des séminaires. Le mécénat est un échange, ce n’est pas seulement un chèque.
Il s’agit d’un échange de culture ?
Tout à fait. Nous apprenons beaucoup au contact des gestionnaires d’espaces naturels. Nous avons appris à connaître et à comprendre la cohérence d’une culture qui, a priori, n’est pas la nôtre. De leur côté, nos partenaires disent apprécier les rencontres que nous organisons sur leur site. Ils aiment connaître nos préoccupations, voire nos réactions. Cette mixité des cultures s’avère très positive. Nous prenons conscience que le monde ne se limite pas à la vie économique telle que nous la connaissons. De leur côté, nos partenaires se rendent compte que pour mener à bien des projets, il faut présenter des dossiers de façon professionnelle et structurée car dans le cadre d’un partenariat, l’approche est différente de celle d’une demande de subventions.
Certains disent que cet échange peut avoir des effets pervers et générer une dépendance à votre égard…
Nous travaillons toujours sur des projets précis, sans nous immiscer dans l’organisation des structures de nos partenaires. Nous apportons nos compétences, nos finances, un réseau d’experts, un réseau international… Cette année, par exemple, nous avons mis en relation le Parc national de Port-Cros et des gestionnaires sur l’île Maurice et prochainement en Guadeloupe. Le Parc de Port-Cros ira sans doute là-bas, pour conduire une expertise. Cependant, il reste encore du travail pour convaincre les gestionnaires d’espaces naturels qu’ils peuvent engager un partenariat avec des industriels sans perdre leur liberté d’actions.

Recueilli par Moune Poli