Au service de l’aigle de Bonelli

 
… l’outil cartographique

Espaces naturels n°17 - janvier 2007

Gestion patrimoniale

Fabrice Bosca
Conservatoire des espaces naturels du Languedoc-Roussillon

 

Viser une connaissance de l’évolution des habitats de l’aigle de Bonelli… à l’exemple de l’étude menée dans les hautes garrigues montpelliéraines.

Cartographier l’occupation du sol, caractériser les habitats fréquentés par les couples d’aigle de Bonelli cantonnés dans les Zones de protection spéciale des départements de l’Hérault et du Gard, fournir des informations sur l’évolution des zones de chasse potentielles et analyser leur évolution… Voilà l’objet d’un programme, piloté par le Conservatoire des espaces naturels du Languedoc-Roussillon et dont les informations recueillies seront utilisées pour la conception des documents d’objectifs. L’étude s’appuie sur un système d’information géographique (SIG). La méthodologie se décline en trois étapes.
La première vise à cartographier l’occupation du sol. Ainsi, les formations végétales, l’usage agricole, les surfaces urbanisées sont identifiées à l’aide de photographies aériennes. Il faut ensuite sous-catégoriser les milieux végétaux et les qualifier en fonction de leur utilisation par l’aigle de Bonelli. Neuf classes de végétaux ont ainsi été définies (cf. tableau). 
La seconde étape de l’étude consiste ensuite à définir, pour chaque catégorie de végétation et d’occupation du sol, un indice d’accessibilité aux proies.
Établir ces niveaux d’indices supposait de bien connaître l’espèce. Savoir par exemple que l’aigle de Bonelli est sédentaire et que des proies doivent être disponibles toute l’année. Elles sont souvent capturées au sol dans les espaces les plus ouverts des hautes garrigues (pelouses, cultures, roche nue…).
De très élevé à très faible, cinq niveaux d’indices ont été établis avec le concours de plusieurs spécialistes de l’espèce (cf. tableau).
Si ces deux étapes permettent d’obtenir une représentation des milieux favorables à l’aigle de Bonelli, la cartographie obtenue reste néanmoins figée. 
Une troisième étape consiste à s’inscrire dans une dynamique temporelle afin de connaître l’évolution du couvert végétal, de l’occupation du sol et de l’accessibilité aux proies sur les trente dernières années. Le croisement de deux cartographies établies respectivement avec des données recueillies en 1972 et 2001 a permis ce résultat. Elle donne lieu à une carte (ci-contre) d’évolution qui illustre cinq tendances : ouverture ; fermeture ; déprise agricole ; développement urbain ; stabilité… D’un seul coup d’œil, il est alors possible de percevoir l’évolution des habitats de l’aigle de Bonelli et d’analyser les tendances. Le même travail a été réalisé pour l’accessibilité aux proies pour laquelle une échelle des tendances à cinq valeurs a été définie : habitats qui restent défavorables, anciens habitats favorables disparus, habitats favorables mais menacés, habitats favorables et stables et nouveaux habitats favorables.
En Languedoc-Roussillon, le constat est alarmant : conséquence de la déprise agricole, la fermeture des milieux est rapide et sensible.
Néanmoins, aussi utile soit-elle, cette méthodologie d’étude ne suffit pas pour prendre les « bonnes » décisions de gestion permettant à l’espèce de conserver ses territoires de chasse. Il faut également connaître avec précision la densité en proies disponibles. Du reste, un programme d’évaluation de la petite faune sédentaire de plaine a été réalisé sur les ZPS de l’Hérault désignées pour l’aigle de Bonelli. Associer ces données à la cartographie réalisée grâce à la photo-interprétation et à l’outil informatique permettra d’identifier des zones d’intervention sur les sites Natura 2000.

1. La notion de ligneux (utilisé dans les intitulés) recouvre tout ce qui est composé de bois : de la ronce à l’arbre. Les ligneux bas ont une hauteur inférieure à 2,5 m ; les ligneux hauts une hauteur supérieure à 2,5 m.