Gérer le public sur l’estran

 

Espaces naturels n°51 - juillet 2015

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Agathe Larzillière, Parc naturel régional d’Armorique

Transformer la contrainte de l'étude d'impact en atout pour l'événement, c'est possible. Même quand des milliers de personnes se retrouvent sur le littoral pour des manifestations sportives ou nautiques.

Tonnerre de Brest 2012 - La grande parade

Le Parc naturel régional d’Armorique a été sollicité par un organisateur de trail de plus de 1000 participants, dont l’une des portions de parcours passe au sein du site Natura 2000, pour un accompagnement à la réalisation de l’évaluation des incidences.
En effet, le parc est opérateur de 6 sites Natura 2000 et à ce titre accompagne plus d’une centaine d’évaluations d’incidences par an, dont une vingtaine sont des trails. Sur le site « Rade de Brest, estuaire de l’Aulne », l’un des enjeux majeurs est la préservation de prés salés d’intérêt communautaire, qui abritent une plante protégée, le Limonium humile, pour laquelle la rade de Brest constitue l’unique station française. Les trails qui rassemblent un grand nombre de participants et qui comprennent des portions de parcours passant sur les prés salés peuvent générer un impact non négligeable par piétinement. Lorsque l’organisateur sollicite le Parc suffisamment en amont, ces impacts peuvent être évités. L’organisateur et la chargée de mission Natura 2000 du site ont d’abord croisé la carte des parcours avec celle des habitats d’intérêt communautaire, ce qui a mis en évidence plusieurs secteurs de prés salés à Limonium humile potentiellement menacés de piétinement. Une visite terrain avec l’organisateur a permis de trouver des sentiers alternatifs pour trois des quatre portions de parcours concernées par la présence de prés salés. Pour la dernière, aucune solution alternative n’ayant pu être trouvée, la chargée de mission a proposé à l’organisateur de matérialiser à la craie un cheminement permettant d’éviter les prés salés et le limonium, et a proposé d’être présente le jour de la manifestation sur cette portion pour sensibiliser les participants. En complément, un panneau a été réalisé et placé à l’entrée du chemin.
Par ailleurs, un état initial sur la base de photos et du comptage de pieds de limonium a été réalisé en amont. Ensuite, pendant l'épreuve, le comportement des participants vis-à-vis du cheminement proposé a été observé. Les photos et le comptage réalisés après la manifestation ont mis en évidence un faible impact puisque seulement un pied de Limonium a été touché.
 

UN PREMIER CONTACT POUR DES ACTIONS COMMUNES

Si au départ la démarche d’évaluation représente une contrainte pour les organisateurs de manifestations sportives (formulaire à remplir, plusieurs contacts à prendre, modification possible du projet initial…), elle peut rapidement s’avérer être un atout à la fois pour l’organisateur et l’opérateur du site Natura 2000 concerné, avant, pendant et après la manifestation :
Avant : Si l’organisateur sollicite un accompagnement suffisamment en amont, un ajustement du projet, souvent à la marge, permet d’éviter les incidences, ce qui simplifie largement la démarche d’évaluation par la suite, a fortiori lorsqu’il s’agit de manifestations récurrentes. Ce travail peut aussi permettre de valoriser la manifestation sur le plan de « l’excellence environnementale » auprès des participants, du public et des propriétaires fonciers concernés.

Pendant : L’accompagnement permet aussi de sensibiliser les organisateurs, qui sont souvent en contact du public et peuvent ainsi à leur tour transmettre des messages, par l’intermédiaire d’outils de communication édités pour la manifestation (plaquettes, panneau, animation), ou intégrés dans les consignes de la manifestation ellemême. La mise en place d’un état initial et d’un suivi, même minimalistes, permet de constituer une base de solutions techniques efficaces pouvant être réutilisées pour des projets similaires sur le territoire du Parc.

Après : Les contacts pris avec les organisateurs sont généralement l’occasion d’échanges riches, qui leur donnent parfois l’envie d’aller plus loin pour préserver et mieux connaître les enjeux naturalistes locaux. Dans les parcs naturels régionaux en particulier, il n’est pas rare que ces échanges débouchent sur des projets communs en faveur du patrimoine naturel dépassant largement le cadre de l’étude initiale, comme la mise en place de formations pour les organisateurs ou de chantiers participatifs.