Europe, une approche diversifiée de Natura 2000

 
D’un État membre à l’autre, la gestion des sites se décline sur divers modes

Espaces naturels n°28 - octobre 2009

Le Dossier

Rob Van Apeldoorn
Alterra Institut de Recherche, Wageningen UR (Pays Bas)

Le processus de désignation des sites du réseau écologique européen est pratiquement achevé. Les différents États européens entrent aujourd’hui dans la phase de gestion. D’un pays à l’autre, similitudes et différences…

Le réseau Natura 2000 est constitué des zones spéciales de conservation (ZSC) issues de la directive Habitats de 1992 et des zones de protection spéciale (ZPS) issues de la directive Oiseaux de 1979. Chaque État membre est tenu de proposer les sites qui, sur son territoire, feront partie intégrante du réseau écologique européen. Un point d’étape nous amène alors à constater que la quasi-totalité des pays ont achevé cette phase de proposition. Ils s’inscrivent à présent dans le processus de désignation formelle des ZSC et de leur gestion. La France, l’Allemagne et le Royaume-Uni en particulier ont fait de gros efforts en ce sens.

La politique de protection des États s’appuie sur une combinaison d’instruments statutaires, administratifs et financiers. Sur le plan statutaire, en France comme dans la plupart des nations d’Europe, les sites Natura 2000 sont parfois des territoires précédemment protégés par des statuts nationaux. Plus de cent statuts de protection coexistent ainsi en Europe.
Si le plan de gestion est utilisé dans de nombreux pays, d’autres outils de planification et de gestion sont également mis en œuvre en s’appuyant sur les législations sectorielles existantes.
C’est le cas des outils d’aménagement du territoire ou encore des plans de gestion forestiers ; ces dispositifs nationaux sont souvent combinés avec une gestion contractuelle.
Certains États comme l’Italie, l’Autriche, la Hongrie, utilisent ainsi les plans d’aménagement du territoire en y intégrant les différents objectifs et mesures de leur politique de conservation. En Finlande et Estonie, les mesures des plans de gestion ont bien été définies en fonction du bon état de conservation des espèces et habitats. Peu d’États cependant ont, à l’exemple de la Wallonie, mis en place des réglementations exigeant comme résultat le meilleur état de conservation possible.
Du reste, si 50 % des États exigent un plan de gestion pour leurs sites, ils n’ont pas rendu les objectifs légalement contraignants pour les propriétaires. En conséquence, hormis lorsque les mesures ont donné lieu à la signature d’un contrat, les autorités ne peuvent assujettir les propriétaires et gestionnaires à leur exécution.

L’utilisation de contrats pour la gestion des sites est en pleine croissance : les États membres ont tous recours aux contrats agroenvironnementaux. Toutefois, les outils financiers incitatifs, telle l’exonération de taxe foncière liée à la charte Natura 2000, uniquement pratiquée en France, sont rares. La compensation financière des pertes de rendement, en revanche, est utilisée dans de nombreux pays (pas en France). Mais, à l’instar de l’Allemagne ou du Royaume-Uni, cet instrument est en passe d’être restreint aux modes de gestion dépassant les « bonnes pratiques ».
La gestion contractuelle se heurte à la difficulté de limiter les impacts négatifs produits par les usagers du site non concernés par les contrats. Mais globalement, le virage semble s’amorcer et, au-delà des interdictions et obligations réglementaires et législatives (qui demeurent nécessaires) de nombreux pays tels l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l’Irlande, se tournent vers le contractuel.

L’échec des contrats doit être envisagé. Cependant, on s’aperçoit par exemple qu’aucun pays n’a imaginé que les responsables de la gestion d’un site puissent exécuter des mesures et les facturer au propriétaire ou à l’usager qui n’a pas rempli ses engagements. Par ailleurs, hormis l’Angleterre, peu d’États usent de la préemption foncière pour protéger les terrains.
Globalement, on note que tous les plans de gestion décrivent les mesures de gestion nécessaires ; ils peuvent également, comme l’exige l’article 6.2 de la directive, prévenir les dommages potentiels de certaines activités humaines en les soumettant à une autorisation particulière. C’est le cas au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, où ces activités doivent être déclarées aux autorités compétentes qui peuvent les stopper ou en limiter l’importance.
En France, la désignation et l’élaboration des Docob ont démarré plus tôt que dans d’autres pays (Pays-Bas, Irlande, Autriche) et la France est en tête sur ces points. Elle doit aujourd’hui se concentrer sur l’efficacité écologique de ces plans de gestion.

1. Mesures agroenvironnementales territorialisées. Source Meeddm. • 2. Source Commission européenne.