Natura 2000 - Ils en témoignent

« Nos relations avec les agriculteurs ont changé »

 

Espaces naturels n°28 - octobre 2009

Le Dossier

Isabelle Civette
Chargée de mission Espaces naturels remarquables, Parc naturel régional du Morvan

 

Depuis 2008, le Parc naturel régional du Morvan propose aux exploitants de prairies sèches siliceuses d’opter pour une mesure agroenvironnementale territorialisée (MAET). Objectif : maintenir leurs prairies fleuries. Si cette mesure séduit le parc, c’est qu’à l’inverse des mesures précédentes qui s’intéressaient aux moyens mis en œuvre afin de reconquérir des milieux dégradés, il s’agit ici de contractualiser une obligation de résultat. Mesure originale, cette MAET reconnaît ainsi la qualité du travail accompli par les agriculteurs et, du même coup, offre l’opportunité d’un changement profond des relations humaines. Du reste, le parc, qui, autour de cette mesure, a investi dans l’animation et l’échange, s’aperçoit qu’il a gagné de la reconnaissance en tant qu’interlocuteur agricole sur son territoire.
La proximité est de règle : pour chaque îlot concerné, les agents du parc se rendent chez les agriculteurs candidats et vérifient la présence de quatre plantes indicatrices parmi vingt-et-une garantissant le bon état de conservation écologique. Ce moment d’échange est particulièrement apprécié. Le chargé de mission se positionne en conseil : il est sollicité pour donner un avis sur la composition floristique de la parcelle, son histoire, les pratiques appliquées. Il n’est là ni pour interdire, ni pour délivrer la bonne pratique.
L’engagement est souple, les agriculteurs ne se sentent pas contraints. Au contraire, la mesure constitue une reconnaissance de leur travail sur ces milieux difficiles : les prairies sèches siliceuses sont particulièrement ardues à exploiter et leur utilisation varie d’une année sur l’autre.
L’identification des plantes est un exercice auquel les agriculteurs, voire la famille toute entière, se prêtent volontiers. La discussion avec les agents porte sur l’intérêt d’une prairie riche en biodiversité pour sa qualité biologique, pour son fonctionnement, pour le bénéfice du bétail.
En complément de l’expertise initiale des parcelles, le parc propose, en juin, une demi-journée de formation gratuite sur le terrain. À cette occasion, les agriculteurs peuvent constituer un herbier des plantes de la liste de référence.
Par ailleurs, le parc accompagne les agriculteurs qui le souhaitent
dans leurs démarches administratives ou lors d’un éventuel contrôle
de l’Agence de services et de paiement (ASP).
Après deux ans, on peut noter que la contractualisation est un succès avec 90 exploitations engagées et 2 127 ha contractualisés. On peut espérer que ces mesures amèneront les agriculteurs à prendre conscience du caractère irréversible de certaines pratiques agricoles sur la flore ; ce que n’avaient pas permis les anciennes mesures agroenvironnementales fondées sur des obligations de moyens.