Des compétences pour faire face au changement
En novembre dernier se déroulait le séminaire Jobs for nature. Isabelle Rambaud1 y animait l’atelier « Manager le changement ». Souvent amenés à solliciter chez d’autres un changement de leurs valeurs et de leurs comportements, les gestionnaires d’espaces naturels n’ont pas toujours conscience de la difficulté que cela représente. Eux-mêmes pourtant, dans de multiples circonstances, doivent agir dans une dynamique de changement. Analyser les processus en œuvre permet de mieux les comprendre et donc de développer des compétences particulières. Lesquelles ?
Etre en prise avec son environnement et traiter l’information. Être en capacité de changer suppose de s’informer en permanence sur l’évolution de son environnement et de savoir traiter l’information recueillie. Clive Walmsley, responsable des impacts environnementaux au Countryside council for Wales (Écosse), insiste sur l’importance de mettre en œuvre de nouvelles pratiques de planification et de gestion des espaces naturels afin d’évaluer l’impact probable du changement climatique. « L’approche doit être scientifique et rationnelle : veille réglementaire et
technique sont indispensables mais une démarche plus globale doit permettre d’apprécier les évolutions à venir, dans leur globalité et leur complexité. À la manière de Monsieur Jourdain, chacun, peu ou prou, met cette approche en œuvre. Mais elle doit s’appuyer sur un travail soutenu d’information, de développement et d’entretien de réseaux professionnels. Elle interpelle fortement nos capacités à traiter, analyser, hiérarchiser, donner du sens à des informations pléthoriques mais fractionnées. »
Faire le deuil des équilibres passés. Les changements répétés mettent à mal les équilibres que nous avions mis du temps à construire. Telle est la principale origine des résistances au changement que, d’ailleurs, chacun peine à reconnaître. Être en capacité de changer, c’est accepter de cheminer pour renoncer aux équilibres passés avec la volonté d’en créer de nouveaux. Plus facile à dire qu’à faire ? Sans doute, puisqu’il s’agit de prendre conscience de ses résistances, d’en situer l’origine, d’accepter l’inconnu et d’y voir une source d’opportunités… L’exemple développé par Stéphanie Savel, directrice de recherche chez ASG (cabinet d’étude et de conseil), concerne la sensibilisation et la mise en œuvre de la démarche écoresponsable. Elle explique que cette évolution s’opère d’autant plus facilement que les résistances sont acceptées et verbalisées. Pour ce faire, elle s’appuie sur la forme théâtrale2. « Celle-ci facilite l’expression des résistances et l’adoption de comportements écoresponsables. »
S’inscrire dans un projet. L’implication dans l’action est le meilleur levier pour s’inscrire dans une logique de changement. Se doter de buts communs, identifier des opportunités de projets, adopter des modes de fonctionnement tout en intégrant les aléas de parcours, pour faire court « se mettre en mode projet », est la meilleure façon de se rendre collectivement plus apte à digérer le changement et en faire une opportunité.
Fort de son expérience menée au Parc national du Mercantour3, Florent Favier, responsable de la communication développe : « La capacité collective à se mettre en mode projet doit pouvoir faire écho des capacités individuelles d’interroger régulièrement son projet personnel (professionnel et de vie), à être en prise avec ses envies, ses priorités, ses capacités, les évolutions de son métier. Il faut être à même de dégager les lignes directrices qui nourriront son implication et sa motivation. »
Plus que jamais. La capacité à développer ses compétences est une autre clé majeure. Collectivement, il s’agira de mettre en place des modes de fonctionnement « apprenants » qui font la part belle à l’expérimentation, l’innovation, mais aussi l’évaluation des pratiques, le retour sur expérience, le travail collaboratif. L’enjeu : développer l’intelligence collective, apprendre à fonctionner ensemble de façon plus souple, plus efficace.
Individuellement, il est nécessaire de se considérer comme le premier gestionnaire de ses compétences, identifier ses besoins, évaluer sa pratique professionnelle, consacrer du temps à sa formation.
Changer. Comment apprendre à changer ? Probablement en étant régulièrement placé en situation de reconsidérer ses façons de penser et d’agir. Un processus qui sera facilité par un management adapté, capable de rassurer, de rendre lisibles les évolutions à venir, d’accepter les manifestations de résistances et de contribuer au cheminement de chacun. Sans oublier les outils et dispositifs conçus pour mieux prendre en main sa destinée professionnelle : bilans de compétences, validation des acquis de l’expérience (VAE) et, au niveau des espaces naturels, le répertoire des métiers et le dictionnaire des compétences des gestionnaires des espaces naturels.
1. Isabelle Rambaud Carassus a également accompagné la démarche « référentiel métiers » de l’Aten. >>> www.metiers.espaces-naturels.fr
2. Cf. Espaces naturels n° 17 -
janvier 2007 - page 31.
3. Une stratégie de communication et de management a été déployée afin d’accompagner les agents du parc national du Mercantour vers les changements induits par la nouvelle loi Parcs de 2006.