Opter pour l’intelligence de l’espace
Espaces naturels n°27 - juillet 2009
Gérard Voisin
Président du réseau des Grands sites de France, Député de Saône et Loire
Cent ans séparent la ratification par la France de la Convention européenne du paysage1 de la première loi sur la protection des sites, intervenue en 1906 (suivie par la loi du 2 mai 1930). Depuis cette date, 2 700 sites ont été classés et 4 800 sites ont été inscrits pour leur valeur paysagère. Ils couvrent aujourd’hui au total plus de 4 % du territoire. Une grande partie d’entre eux est intégrée dans le réseau Natura 2000, comme ils le seront dans la trame verte et bleue, mettant ainsi en exergue le lien entre diversité paysagère et biodiversité.
Ce bilan, nous le devons à des générations d’inspecteurs des sites qui identifient les sites remarquables, en explicitent les valeurs, conduisent les procédures d’inscription et de classement, gèrent les autorisations de travaux, réfléchissent en partenariat avec les élus et les acteurs locaux aux modes appropriés de gestion.
À l’aune de l’expérience des grands sites dont l’attractivité touristique est particulièrement forte, quelques enseignements peuvent être tirés et nous aider à mieux gérer l’ensemble des territoires.
On retiendra d’abord que la protection d’un site n’interdit pas son développement ou son évolution. Le classement ne signifie ni immobilisme, ni interdiction de tout aménagement ou construction. Simplement, pour être autorisées, les interventions doivent être pensées, argumentées, réalisées en lien direct avec les valeurs du site et les caractéristiques paysagères qui ont motivé son classement, et dans le cadre d’un projet global, créatif et sensible.
On constatera ensuite que les démarches paysagères, parce qu’elles reposent sur une compréhension fine des caractéristiques historiques, géographiques, écologiques et fonctionnelles, sont à même d’enrichir considérablement l’approche des outils de planification du territoire (Scot, Plu) et les décisions d’aménagement à plus petite échelle.
La question n’est pas celle du montant de ces démarches. Il est dérisoire comparé au coût économique, social et écologique lié au gaspillage des terres, à l’étalement urbain ou encore au désastre des entrées de ville, pour ne prendre que ces exemples.
Les méthodes existent, les savoir-faire des professionnels du paysage aussi.
À nous tous, élus, État, décideurs, de faire le choix d’une « réelle intelligence de l’espace ».
1. Le 17 mars 2006, la France reconnaissait le paysage comme une valeur essentielle du cadre de vie et un enjeu économique majeur et s’engageait à mieux le protéger, gérer et aménager, qu’il soit rural ou urbain, remarquable ou ordinaire.