L’analyse des micro-organismes

un outil d’étude et de gestion des tourbières

 

Espaces naturels n°11 - juillet 2005

Le Dossier

Daniel Gilbert
Laboratoire de biologie environnementale, Besançon.
Edward Mitchell
École polytechnique fédérale de Lausanne
 

Les micro-organismes sont encore mal connus.  Leur étude pourtant, se révèle être un moyen performant pour connaître le fonctionnement et l’histoire des tourbières.

Les organismes microscopiques sont très abondants à la surface des tourbières à sphaignes. Certains peuvent être photosynthétiques (cyanobactéries, algues unicellulaires), prédateurs (protozoaires, rotifères, nématodes) ou décomposeurs (bactéries, champignons). Ces micro-organismes sont étroitement dépendants des végétaux constructeurs de tourbe que sont les sphaignes, en particulier parce que ces mousses maintiennent un taux d’humidité élevé indispensable à leur survie.
Cependant, les sphaignes ont, elles aussi, besoin des micro-
organismes qui fixent et recyclent les éléments nutritifs indispensables à leur croissance.
Depuis plusieurs années, les chercheurs ont pris en compte les liens très étroits qui existent entre les sphaignes et les micro-organismes. Ils s’en servent aujourd’hui pour mettre en évidence la qualité actuelle ou passée des tourbières. Ainsi, en fonction de la diversité et de l’abondance des différentes espèces de micro-organismes, il est possible de mettre en évidence les effets d’un apport d’azote atmosphérique ou d’un drainage.
L‘un des groupes de micro-organismes le plus utilisé pour étudier les tourbières est celui des amibes à thèques, ou thécamoebiens, car il présente un triple avantage : les espèces sont très abondantes dans les sphaignes, elles sont souvent très spécifiques des conditions du milieu et elles possèdent une enveloppe externe (la thèque) qui persiste dans la tourbe après leur mort et permet leur identification. Ces caractéristiques peuvent être très utiles pour reconstituer l’histoire de la tourbière au cours des siècles, mais aussi, plus simplement, pour suivre l’avancement de la restauration après exploitation.
L’étude des micro-organismes est un moyen performant pour comprendre le fonctionnement des tourbières, mais leur utilisation est limitée parce qu’ils restent encore mal connus. La réalisation future de guides pratiques de gestion et de détermination pourrait permettre de lever ces inconvénients.