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Le classement ne suffit pas pour exister

 

Espaces naturels n°25 - janvier 2009

Aménagement - Gouvernance

Nicolas Maslach
Conservateur de la réserve naturelle nationale de Saint-Martin

 

Sept ans après sa création, la réserve naturelle dans l’île de Saint-Martin (Antilles) n’est plus remise en cause. Après un travail stratégique difficile, les élus, les opérateurs touristiques et la plupart des usagers sont conscients de son utilité. Malgré tout, la tâche reste ardue et la nécessité de veiller permanente.

Dix ans auront été nécessaires à l’association Action nature pour arriver à imposer l’idée de création d’une réserve naturelle dans l’île de Saint-Martin, objet depuis le début des années 80 d’un développement rapide et souvent anarchique, lié aux premières lois de défiscalisation. L’idée est de préserver, au nord de l’île, un capital environnemental menacé, et régulièrement mis à mal par les voleurs de sable et autres pêcheurs clandestins.
Le 3 septembre 1998, c’est chose faite : un décret ministériel classe 2 900 hectares de superficie marine, 176 hectares de littoral et deux étangs… sur le papier.
Deux ans de plus, et l’arrivée de son conservateur, seront nécessaires pour que l’existence de la réserve naturelle perde le caractère virtuel et purement réglementaire de ses débuts.
Mais comment s’en étonner ? L’État, propriétaire du territoire de la réserve, ne disposait d’aucun service environnemental sur ce morceau de France situé à 350 kilomètres de la Guadeloupe.
Ni la direction de l’environnement, ni l’Office national des forêts, ni l’Office national de la chasse et de la faune sauvage ne sont présents sur l’île. Une île coupée en deux entre la France et les Pays-Bas par une frontière virtuelle, mais par des lois et des règles bien différentes et bien réelles. Sint Maarten, la partie hollandaise, fait partie des Antilles néerlandaises et a placé l’environnement au dernier rang de ses priorités, au bénéfice de la construction de plusieurs grands hôtels, et d’un développement qui n’a rien de durable : l’ensemble des zones humides de ce territoire a disparu ces vingt dernières années.
Sur la partie française, la loi Littoral devrait s’appliquer. Pourtant, le 3 septembre 2001, quand arrive le conservateur de la réserve naturelle, les chantiers de constructions sauvages ne sont pas rares. Quant au tourisme, la plupart des activités terrestres et maritimes s’exercent le plus souvent sans autorisation. Chaque année, le développement non contrôlé menace davantage les plus beaux sites que sont l’îlet Pinel, l’île de Tintamarre, le Rocher Créole et la longue plage du Galion.
Bien du chemin a été parcouru et l’existence de la réserve naturelle n’est plus remise en cause mais la tâche reste ardue et la nécessité de veiller permanente : les atteintes à la réglementation, même en baisse, ont la vie dure.