Les espaces naturels, lieux d’observation privilégiés

 
L’ONERC travaille déjà depuis de longues années avec des gestionnaires pour obtenir des données et les analyser. La hausse des températures est loin d’être le seul symptôme observé.
Le Dossier

Nicolas Bériot
Secrétaire général de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC)

Quel est l’intérêt de la donnée fournie par les espaces protégés ? Comment se mettre en ordre de marche pour avoir des résultats cohérents et utiles aux scientifiques qui travaillent sur le sujet ?

Certains paramètres évoluent lentement : par exemple, hausse de températures moyennes, de l’ordre de 0,2 °C par décennie, hausse du niveau marin, de l’ordre de 3 mm/an se traduisant dans certaines conditions par un déplacement de trait de côte de 30cm/an, évolution des précipitations moyennes. Les extrêmes peuvent être affectés : canicules, sécheresses, intensité maximale de précipitations, par exemple.
Mais aussi : des seuils peuvent être franchis, faisant passer un équilibre écosystémique vers un autre ensemble d’états, un autre équilibre, dont la composition en espèces, le fonctionnement, et les services rendus aux autres milieux environnants seront différents. Enfin, la disparition de telles espèces végétales ou animales d’un espace naturel est possible.
Les gestionnaires, techniciens et scientifiques en charge des espaces naturels protégés sont des observateurs privilégiés des impacts du changement global(1). Ils peuvent déceler des modifications des milieux qui, sans être attribuables au seul changement climatique, peuvent être reliées à celui-ci. Citons par exemple, et sous réserve d’analyses scientifiques spécifiques : le déplacement des limites de présence d’espèces végétales selon la latitude ou bien en altitude, les dates de floraison et de maturation, le déplacement des limites des habitats d’espèces animales, les dates de migration d’oiseaux, les calendriers de reproduction. Un autre domaine particulier d’observation peut être la santé animale et végétale : en effet, des maladies vectorielles et parasitaires verront leurs conditions de développement et leurs zones d’extension fortement modifiées par les évolutions climatiques.

A ce jour, l’ONERC dispose de quelques indicateurs de ce type, produits par les organismes partenaires : date de floraison de la vigne, date de vendange, évolution des populations de certaines espèces d’oiseaux, front d’expansion de la chenille processionnaire du pin, date de floraison d’arbres fruitiers (cf. www.onerc.gouv.fr, rubrique « données essentielles »). D’autres propositions pourraient venir des responsables et acteurs des espaces naturels protégés ; elles seraient alors étudiées par l’ONERC en consultation avec les scientifiques. De tels dispositifs d’observation nécessitent, bien sûr, une grande pérennité et les garanties scientifiques et techniques appropriées – ce que les espaces naturels protégés peuvent offrir.

(1)Redisons-le : le changement climatique est un facteur du changement global, parmi d’autres, tels que l’artificialisation des sols, le changement d’affectation des terres, l’exploitation des  ressources en eau, l’acidification des océans, les pollutions etc.