Une reconnaissance juridique en attente d'effets pratiques

 
>>> Corridors biologiques
Le Dossier

Marie Bonnin
Docteure en droit Centre de droit de l’environnement université de Strasbourg

 

La reconnaissance de l’importance des corridors biologiques par le droit est une nouvelle donnée juridique qu’il importe de souligner. Ainsi, plusieurs textes de droit international et communautaire incitent les États à la protection et à la gestion des corridors. Parmi eux, la Stratégie paneuropéenne pour la diversité biologique et paysagère (voir article page 13) vise à renforcer la cohérence écologique de l’Europe. Comme d’autres cependant, ce texte reste non contraignant. En droit communautaire, la directive Habitat de 1992 incite les États à protéger « là où ils l’estiment nécessaire » des milieux particulièrement importants en matière de fragmentation des habitats naturels. Ainsi, l’intégration de la cohérence écologique dans des documents d’aménagement du territoire permet d’espérer la multiplication des expériences pratiques.
Protection de la nature
Plusieurs pays ont intégré la notion de corridor dans leur corpus juridique de protection de la nature. Certains ont adopté des lois, d’autres ont préféré la voie réglementaire des plans de protection de la nature. Ainsi, la République tchèque a mis en place un réseau écologique national appelé « Système de stabilité territorial » (loi de protection de la nature et des paysages de 1992). En Belgique, la Région flamande a opté pour la protection des corridors par un texte législatif (1997). On notera cependant que leur mise en œuvre concrète n’est pas systématisée au niveau local. Les Pays-Bas ont élaboré un plan national de gestion de la nature dès 1990. Il prévoyait la réalisation d’un Réseau écologique national dans les trente années suivantes. Le nouveau plan de juillet 2000, intitulé « Nature for People, People for Nature » poursuit le même objectif. Dénué de force contraignante, ce plan développe cependant une communication autour du concept de réseau écologique qui a un effet multiplicateur sur les initiatives locales.
Aménagement du territoire
En septembre 2000 à Hanovre, les ministres européens responsables de l’aménagement du territoire ont adopté des principes directeurs pour le développement territorial durable du continent européen. Le principe 40 indique que : « L’aménagement du territoire a en outre pour tâche de contribuer à la reconstitution et à la protection des écosystèmes, y compris des réseaux écologiques. » Cette volonté d’intégrer les corridors biologiques dans l’aménagement du territoire transparaît dans le droit de nombreux pays d’Europe, comme en Estonie ou en Suisse. En France, la loi d’orientation pour l’aménagement durable du territoire de 1999 opère une première reconnaissance juridique de la notion de réseaux écologiques. L’article 23 de cette loi prévoit que le schéma de services collectif des espaces naturels et ruraux devra identifier « les réseaux écologiques, les continuités et les extensions des espaces protégés qu’il convient d’organiser ». Ce schéma a été adopté de façon définitive en avril 2002. Les exemples récents de protection des corridors biologiques au niveau local, comme la trame verte alsacienne ou le schéma de cohérence territoriale de la région grenobloise montrent que ces textes sont progressivement pris en compte.