Corridors écologiques

Un nouvel état d’esprit

 
Le Dossier

Gérard Moulinas
Directeur de la Fédération des Parcs naturels régionaux de France

 

En France, 45 258 km de voies maritimes et terrestres fragmentent le territoire. La mise en œuvre de corridors écologiques ne relève pas d’une réponse technique adaptée à des problématiques de gestion de la nature mais d’un nouvel état d’esprit en faveur de la biodiversité.

A l’échelle mondiale, à l’échelle européenne, à l’échelle nationale… la perte de la biodiversité est une réalité. Et, tandis que nos milieux professionnels et bénévoles la martèlent, les médias ne l’abordent que sous un angle alarmiste, expliquant rarement, comment l’enrayer.
Les milieux politiques sont rarement sensibles à cette réalité. En effet, trente ans après l’entrée en vigueur de la loi sur la protection de la nature1, elle interroge nos politiques et nos modes de protection et de conservation : d’abord centrés sur la protection des espèces, évoluant vers celle des habitats, il devient impératif, dans une suite logique, de s’intéresser aux corridors écologiques, c’est-à-dire aux continuités et connexions entre milieux d’intérêt écologique !
On ne peut ignorer que la fragmentation, la banalisation, la pollution et l’artificialisation des paysages et des milieux, provoquées par les activités humaines, entraînent l’érosion de la biodiversité en diminuant les capacités de dispersion et d’échanges entre espèces animales et végétales. La perte de la biodiversité (ensemble des espèces, des écosystèmes et des processus écologiques) nous invite donc à travailler sur sa dynamique et son évolution à l’échelle de nos territoires. Ceci, bien sûr, en complément de nos stratégies classiques. Dans cette optique, le maintien, voire la création de corridors, permet de favoriser les flux d’espèces. Intuitivement, mais également scientifiquement et techniquement, on discerne bien qu’il s’agit d’une dimension fondamentale pour la survie de nombreuses populations et indispensable pour la recolonisation d’habitats perturbés.
Cet aspect fonctionnel, dynamique et évolutif de la biodiversité, visé par la définition d’un réseau écologique, est basé sur trois éléments minimums : les zones cœurs ou taches, les corridors et, enfin, la matrice paysagère. L’approche est relativement nouvelle. Elle peut se traduire en termes de stratégie territoriale de protection de la nature et être intégrée dans les projets, outils et documents d’aménagement du territoire et d’urbanisme. Elle s’attache aussi à sensibiliser et convaincre tous les partenaires d’un territoire, à commencer par ses élus. Les premières expériences concrètes présentées dans ce dossier en sont la parfaite illustration, des interrogations demeurent cependant.
À l’heure de la Stratégie nationale pour la biodiversité, puisse ce dossier participer à la réflexion sur une nouvelle politique ambitieuse de protection de la nature en France.

1. Elle date du 10 juillet 1976.