Parc national des Cévennes

Une stratégie de gestion basée aussi sur la connaissance des forêts anciennes

 

Espaces naturels n°36 - octobre 2011

Le Dossier

Vinciane Febvre
Parc national des Cévennes
Grégoire Gautier
Parc national des Cévennes
 

Les gestionnaires du parc national des Cévennes intègrent l’ancienneté des forêts parmi les critères réglementant les coupes ou plantations. En effet, les forêts anciennes abritent une part originale de la biodiversité.Les gestionnaires du parc national des Cévennes intègrent l’ancienneté des forêts parmi les critères réglementant les coupes ou plantations. En effet, les forêts anciennes abritent une part originale de la biodiversité.

Plusieurs études scientifiques montrent que les forêts anciennes bénéficient de conditions de sols particulières et accueillent une part originale de la biodiversité forestière. Ces forêts doivent donc être intégrées par une stratégie de préservation qui leur est propre.
Qu’en est-il du Parc national des Cévennes où la plupart des forêts sont relativement jeunes ?
La majorité des forêts provient en effet de plantations réalisées par l’État dans le cadre de la restauration des terrains de montagne au 19e siècle. L’exode ayant par la suite, amplifié l’abandon des grands espaces montagnards, petit à petit colonisés par de jeunes forêts.
En moins de deux siècles, la surface forestière a ainsi été multipliée par cinq. Mais quels étaient les noyaux forestiers préexistants ? La biodiversité y est-elle différente ?

Les cartes comme support. Les cartes d’état-major de 1850 ont permis de localiser ces noyaux anciens. Ce fond cartographique correspond en effet au minimum forestier du territoire cévenol. Il est le plus fiable, à la fois du point de vue de la date de réalisation et de la précision de la donnée. Il a donc été digitalisé puis croisé avec l’occupation actuelle pour faire ressortir les forêts préexistantes. On les nomme forêts anciennes par opposition aux forêts récentes : une distinction qui fait référence à la continuité de l’état boisé quelles que soient la maturité des arbres et la nature des essences en place.

Une biodiversité singulière. Dans les forêts anciennes du parc national des Cévennes, une analyse de 342 relevés floristiques a permis de mettre en évidence une liste de dix-sept espèces végétales plus fréquentes (Anemone nemorosa ou Luzula sylvatica…). Ces espèces forestières relativement communes montrent un profil écologique particulier : elles sont globalement tolérantes à l’ombre et au stress, peu compétitives et à faible capacité de dispersion.
En revanche, l’effet sur d’autres groupes taxonomiques (lichens, insectes, bryophytes, champignons) reste à mettre en évidence.
Ce travail a révélé la nécessité de prendre en compte les données historiques pour la préservation de la biodiversité. Aussi, dans le cadre de l’élaboration de la charte du parc national, il a été décidé, en concertation avec les acteurs locaux, d’intégrer l’ancienneté des forêts comme un des critères à prendre en compte dans la réglementation relative aux coupes ou plantations. Cette vigilance doit, par exemple, permettre de proscrire les défrichements en forêts anciennes dans les années à venir, étant donné qu’ils sont soumis à autorisation du parc.
Par ailleurs, les îlots de sénescence et les forêts en libre évolution (implantés par l’ONF en concertation avec le parc), seront de préférence implantés sur ces espaces anciennement boisés.
Les forêts anciennes n’ont cependant pas l’exclusivité de la richesse et de la diversité. Il convient donc d’intégrer l’ancienneté comme un des critères à prendre en compte parmi de nombreux autres (habitats et espèces présents, maturité du peuplement, surface et continuité géographique, etc.) pour aboutir à l’élaboration d’une stratégie optimale de préservation de la biodiversité des forêts.