Un couteau suisse

 
pour évaluer la qualité écologique des milieux

Espaces naturels n°21 - janvier 2008

Méthodes - Techniques

Natacha Koller

Myriam Charollais

Agridea Lausanne, Suisse
 

Comment sensibiliser les agriculteurs et agricultrices à la qualité écologique des milieux naturels qu’ils entretiennent ? La question s’est posée quand, en 1993, la Suisse a choisi de verser des compensations financières à ceux qui s’engageaient dans une exploitation extensive, en vue de favoriser la biodiversité.
Jusqu’ici les agriculteurs étaient tenus de respecter des conditions d’entretien mais aucune exigence n’était requise quant à la qualité écologique résultant de ces pratiques. C’est pourquoi, des scientifiques associés à Agridea1 ont mis au point une méthode d’appréciation de la qualité des milieux dont on retiendra que le principe est simple : il repose sur des observations de terrain. 
La méthode a nécessité un important travail scientifique pour mettre en évidence des espèces indicatrices et en élaborer des critères synthétiques simples à l’emploi. Elle permet alors une évaluation rapide et fiable de la qualité écologique d’un milieu (prairie, pâturage, haie ou verger haute tige). Elle est utilisable par des non-spécialistes.
Dans sa dimension opérationnelle, cette méthode s’appuie, d’une part sur des fiches illustrées (voir ci-dessous) présentant les critères d’appréciation et, d’autre part, sur des fiches de relevés. Les critères d’évaluation sont de deux ordres :
• ceux qui évaluent la diversité biologique. Ils sont basés sur des espèces indicatrices et des informations synthétiques (la couleur dominante de la floraison d’une prairie par exemple) ;
• ceux qui se réfèrent à la situation et à la structure de la parcelle (distance de la surface par rapport à d’autres milieux naturels, présence de buissons, de tas d’épierrage, etc.).
Comme dans les tests de magazines féminins, chaque critère est noté par un symbole. L’utilisation de ces emblèmes revêt un caractère positif et incitatif (pas de points négatifs pour sanctionner un milieu de qualité écologique banale). Il comporte également l’avantage de dégager une tendance, même si tous les critères requis n’ont pu être observés. Les résultats, qui permettent d’évaluer la qualité écologique de la parcelle, renvoient aussi à des commentaires et propositions d’amélioration.
Les observations peuvent être renouvelées au cours d’une même année, voire poursuivies pendant plusieurs années, afin d’observer l’évolution de la qualité de la surface.
Cette méthode a rencontré un succès relativement limité auprès des exploitant(e)s. En revanche, sa facilité d’emploi, sa fiabilité et son système de notation attrayant en ont fait un outil souvent utilisé dans la formation agricole. Elle pourrait d’ailleurs être utilisée comme outil d’animation et de sensibilisation dans les espaces naturels en adaptant les espèces indicatrices aux conditions régionales ou locales.
D’un point de vue politique, cet outil (et surtout les bases scientifiques qui ont permis son élaboration) a eu d’importantes répercussions puisqu’il a servi à la préparation d’une nouvelle base légale : l’ordonnance sur la qualité écologique, qui permet l’octroi de contributions financières aux surfaces de bonne qualité écologique. Les prairies qui présentent une certaine densité d’espèces indicatrices intéressantes d’un point de vue écologique reçoivent des contributions supplémentaires. Il en va de même pour les haies qui remplissent certains critères de composition botanique (essences indigènes, pourcentage de buissons épineux) et de structure (largeur minimale…). Les « clés d’appréciation de la qualité écologique » peuvent être commandées sur le site www.agridea.ch.

1. Agridea
est une association suisse.
160 collaborateurs développent des prestations pour l’agriculture et l’espace rural : publications ; logiciels ; formations ; mandats et développement de projets.