Questions à Régis Colonna Cesari

« La légitimité réside dans le pouvoir de verbaliser »

 
Droit - Police de la nature

Régis Colonna Cesari
Coordinateur des gardes en mer. Réserve naturelle des bouches de Bunifaziu (2A).

 

Les agents de la réserve sont-ils tous commissionnés ?
Nos dix agents sont commissionnés « Police de la nature », nous pouvons donc verbaliser les infractions au décret de création de la réserve. En revanche, seuls six d’entre nous ont un commissionnement « Pêche maritime ». Celui-ci permet simplement de constater, par procès-verbal, les infractions liées à la pêche en mer.

La coordination avec les autres administrations s’avère donc un point important…
C’est un nœud de l’efficacité. D’ailleurs, nous nous rencontrons régulièrement. C’est ainsi que nous programmons l’intervention de l’ONCFS, par exemple, afin que les agents nous accompagnent ou qu’ils mènent seuls les interventions sur le terrain.
Nous travaillons aussi avec le parquet afin d’aboutir dans la mise en place de notre politique pénale. Tous les ans, ou tous les deux ans, nous amenons le procureur ou le substitut sur le terrain. Nous leur expliquons nos problématiques… Nous avons leurs coordonnées, il devient possible de les appeler même de nuit.

Comment faites-vous pour déjouer les braconniers ?
Trois équipes tournent, de jour comme de nuit. Notre but est de faire en sorte que notre organisation ne soit ni lisible, ni prévisible. Nous varions nos horaires d’intervention et le lieu d’amarrage de nos bateaux. Nous organisons le travail en relais avec les douanes, avec l’ONCFS, avec les affaires maritimes. Nous avons également mis en place des conventions avec les sémaphores. Des agents de la réserve y font le guet avec les jumelles. Sur certains secteurs, nous intervenons également depuis la côte, sans bateau.

Mais vous n’avez pas d’arme… ?
Ce n’est pas un handicap. Ce qui prime pour asseoir une légitimité, c’est d’avoir des pouvoirs en matière juridique. Certains peuvent nous percevoir comme « des gentils »… Mais les choses diffèrent quand nous verbalisons ou quand nous informons de manière précise sur l’aspect environnemental.
C’est d’ailleurs pourquoi nous regrettons, par exemple, de ne pouvoir verbaliser directement un contrevenant étranger. Il faut l’accompagner à la gendarmerie qui dressera le procès-verbal.
Plus qu’une arme, ce qu’il nous faudrait, c’est un uniforme adapté.

Quelles sont les conditions de l’efficacité ?
Il faut avoir une bonne connaissance des pratiques de la pêche, des engins, de la taille des filets… connaître le milieu marin aussi. Et maîtriser son secteur d’intervention : connaître les remontées convoitées par les braconniers ou dangereux pour la navigation de nuit.
Il faut aussi connaître tous les acteurs : clubs de plongée, pêcheurs professionnels, locataires de bateaux… Nous faisons beaucoup de relationnel.

Quelles infractions constatez-vous le plus souvent ?
La chasse sous-marine en zone de protection renforcée. Dans la réserve, il y a plus de poissons qu’ailleurs (sourire). Nous sommes victimes de notre réussite !