Marche pour le climat, la jeunesse se mobilise - Akim Viennet, étudiant en physique à l'École normale supérieure

 

Espaces naturels n°67 - juillet 2019

L'entretien

Propos recueillis le 03/04/19 par Anne Perrin

« C'est nous qui vivrons, après 2050, les catastrophes annoncées... »

© Akim Viennet

© Akim Viennet

Pouvez-vous nous présenter votre mobilisation. En quoi consiste-t-elle précisément, qui manifeste, et pourquoi ?
Lorsque je dis « nous », je parle principalement des réseaux que je connais, les étudiants des universités parisiennes, rejoints par de nombreux lycéens, surtout le 15 mars, journée de la grève internationale du climat pour la jeunesse. Nous avons lancé les vendredis pour le climat en écho à l’appel à une mobilisation hebdomadaire, le mouvement international de « grèves scolaires pour le Climat » lancé par l’adolescente suédoise Greta Thunberg1. À Paris, nous avons décliné cette mobilisation en marches, précédées de discussions en assemblées générales et d’ateliers visant à définir nos revendications. Notre mouvement est protéiforme. Beaucoup de groupes se sont unis, puis désunis. D’autres mouvements existent. Pour ce qui nous concerne, jusqu’à 400 personnes se sont réunies lors du lancement à la fac de Jussieu. Une équipe pilote s’est organisée en groupes de travail qui ont élaboré nos revendications, qui ont ensuite été votées en réunion plénière.

Le mot d’ordre de Greenpeace est « Bougeons-nous pour le climat et la biodiversité ». Or on entend surtout parler de marche « pour le climat », qu’entendez-vous par « biodiversité » ?
Nous marchons certes pour le climat, mais la protection de la biodiversité fait partie de nos revendications. Le CO2 n’est pas notre seul objectif. Par ailleurs, il faut prendre en compte les dégâts du changement climatique sur l’environnement et la biodiversité dans une dimension systémique. Certaines solutions alternatives pour diminuer les émissions de CO2 sont désastreuses pour la biodiversité. Promouvoir les voitures électriques n’est pas sans conséquence, cela implique l’usage de plus en plus de batteries, la construction de voitures, etc. Même chose pour les panneaux solaires. La question énergétique est intéressante sur ce point, on insiste pour utiliser des énergies renouvelables, certes c’est une chose. Mais nous pensons qu’il faut pousser la réflexion plus loin. Travailler sur notre dépendance à l’énergie. Aller vers un changement complet de paradigme, repenser notre rapport au vivant.

Quels sont vos principaux relais ?
Nous avons créé un groupe Facebook en lien avec le mouvement international Youth for Climate, qui a des déclinaisons ville par ville dans presque tous les pays d’Europe. Nous sommes également en lien avec Greenpeace et Alternatiba, notamment pour le 15 mars. Le média Reporterre2 nous a aussi proposé une tribune régulière relayant nos revendications. Nous avons ainsi écrit sur des sujets précis, six courts textes. Notre premier texte publié avait pour but de déclarer l’état d’urgence écologique et sociale afin de débloquer un plan interministériel à la hauteur des risques encourus. Pour nous, la priorité est que le gouvernement ne mette pas en place quelques mesures à la marge, mais un véritable pacte d’urgence qui regroupe les actions de tous les ministères concernés sur différents thèmes. Nous avons également écrit sur l’énergie, l’alimentation, l’écoféminisme, etc.

De nombreux YouTubeurs s’engagent pour la biodiversité et le climat, avezvous des liens avec eux et quelles sont les prochaines étapes du mouvement ?
En effet, nombreux sont les YouTubeurs qui se mobilisent. Je pense par exemple aux collectifs « On est prêt », « Il est encore temps », ou « Partager c’est sympa ». On constate avec tous ces projets que le sujet dépasse les clivages politiques traditionnels. Nous sommes proches de « Partager c’est sympa », qui parle d’écologie dans sa dimension politique, et a fait des vidéos expliquant notre démarche. Pour la suite, nous souhaitons maintenir une mobilisation hebdomadaire, chaque vendredi. Nous organisons aussi une grande fête en vue de la mobilisation du 19 avril, avec musique et stands pour s’informer, discuter. Nous n’avons pas encore tranché sur les suites du mouvement.

1 Depuis l'été 2018, chaque vendredi, Greta Thunberg manifeste devant le parlement à Stockholm.
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