Les espaces naturels, lieux d’observation privilégiés (2)

 
L’enjeu scientifique réside alors dans la mise en évidence et le décryptage des conséquences de tels bouleversements.
Le Dossier

Denis Couvet,
MNHN,
couvet@mnhn.fr

L’enjeu scientifique réside alors dans la mise en évidence et le décryptage des conséquences de tels bouleversements.
Décrypter le lien entre biodiversité et changement climatique n’est possible que si les chercheurs disposent de jeux de données collectées in natura, à une échelle spatio-temporelle comparable à celle des impacts étudiés. Pour en distinguer les causalités, il faut aussi disposer de données permettant de comparer l’effet des différentes composantes du changement global (climat, pertes d’habitat, eutrophisation, pesticides…), donc réparties dans des habitats exposés de manière différentes à ces diverses composantes, de manière à pouvoir isoler les facteurs déterminant la réponse du vivant au changement climatique.

D’où l’intérêt des espaces protégés. D’une part, certains constituent des cas limites dans lesquels la biodiversité est à l’abri des activités humaines en usage sur le reste du territoire. D’autre part, les jeux de données collectés à grande échelle existent, issus d’initiatives naturalistes ou de programmes participatifs ouverts à tous. En théorie, les conditions sont donc réunies pour déterminer les impacts à grande échelle du changement climatique sur le vivant. C’est indispensable
s’il s’agit de distinguer les causalités et ainsi d’identifier ce qui relève du changement climatique.

À titre illustratif des promesses de ces jeux de données continentaux, un premier exemple particulièrement frappant a mis en évidence l’impact de la hausse des températures sur les communautés d’oiseaux et dans une moindre mesure sur celles de papillons. Ces deux groupes taxonomiques ne montrant, malgré leur potentiel de dispersion, qu’une capacité limitée à s’adapter au rythme du changement. Une analyse comparant la dynamique dans les espaces protégés devrait permettre de mieux comprendre leur effet. Ainsi les espaces naturels gérés devraient voir leur contribution valorisée et leur rôle légitimé. 

Deux types de jeux de données coexistent dans et autour des espaces naturels gérés : ceux collectés dans le cadre d’un protocole standardisé et ceux correspondant à des observations naturalistes non coordonnées, les données opportunistes. En termes de perspectives, de récents développements montrent que l’analyse conjointe des jeux de données est synergique, la précision du premier jeu se combine au volume du second, offrant des possibilités d’analyses scientifiques de plus en plus poussées.