Les bateliers ont su voir leur intérêt dans la qualité
Espaces naturels n°34 - avril 2011
Sandrine Guihéneuf
Syndicat mixte Parc interrégional du marais poitevin
La batellerie s’impose comme l’activité emblématique du marais poitevin. Professionnels et gestionnaires du patrimoine ont trouvé un intérêt commun au travers de la démarche qualité initiée depuis plus de vingt ans. Près de la moitié des embarcadères sont aujourd’hui « labellisés ».
On l’appelle la « Venise verte ». Monde d’eau, de conches et de verdure, le promeneur vient ici, à l’est du marais poitevin, saluer la nouvelle Destination touristique européenne d’excellence ou, plus simplement, se balader sur les canaux. Certains embarcadères proposent des visites guidées et affichent fièrement leur label Engagement qualité. La batellerie est l’activité la plus importante et la plus emblématique du territoire.
Une longue démarche, ce label ! Résultat d’un investissement des professionnels, aux côtés du syndicat mixte du Parc interrégional du marais poitevin (territoire labellisé Grand site de France dans sa partie « marais mouillé »). Ce pas à pas vers la qualité s’est aussi traduit par la restauration du paysage, des ports, quais, cales, des lieux susceptibles d’accueillir le public.
Les choses ont débuté classiquement. Puisqu’on allait accueillir du public, il convenait de sensibiliser les guides permanents et saisonniers à la connaissance du marais et de son patrimoine. En vingt ans, ce sont 2 000 bateliers qui ont été formés, créant ainsi l’assise d’un véritable partenariat entre les prestataires privés et la collectivité.
Dans le droit-fil de cette première étape et comme pour la consolider, le syndicat mixte a élaboré avec ses partenaires un schéma du balisage des voies d’eau. Sur les 8 500 km de canaux, trois cent cinquante ont été balisés. Les promeneurs peuvent dorénavant s’orienter sans guide. Ils sont cependant canalisés hors de certaines grandes zones sensibles : ce travail, quelque peu monumental, visait déjà la sauvegarde.
Puis, comme une évidence, les échanges se sont faits réguliers. En collaboration avec IGN, le parc a pu éditer une carte nautique qui promeut les promenades en canoë ou en barque, sans guide. Un plan des voies d’eau par secteur reprend l’historique du marais et rappelle (en plusieurs langues) des consignes de sécurité. Des affiches et dépliants dévoilent les « cinq règles d’or » à respecter pour la préservation du marais.
Au fur et à mesure qu’ils se reconnaissaient et s’appréciaient, les partenaires ont travaillé plus au fond. Ils se sont penchés sur l’application de la réglementation. Celle concernant le gabarit des barques, le permis des guides, le droit du travail, la signalisation… insensiblement, embarcadères, comités de tourisme, services de l’État, syndicat mixte… entraient dans une démarche qualité.
Les choses ont pris de l’ampleur quand, il y a cinq ans, la question s’est posée de l’évaluation de cette qualité.
Passé le constat que la batellerie est une activité emblématique, idéale pour découvrir le marais à un rythme et mode respectueux de l’environnement, restait la question des importantes disparités d’un embarcadère à l’autre.
Comment distinguer les différences de prestations ? Comment pousser les acteurs à s’auto-améliorer dans le respect de l’esprit des lieux ?
Les partenaires font alors appel à un audit extérieur, ensemble ils définissent une « grille de qualité » : 168 points à contrôler chez les embarcadères proposant des visites guidées. Promotion, accueil, bâtiments, matériel, embarcations, signalétique, discours des guides, prise en compte de l’environnement, participation aux politiques de gestion et d’entretien du site… cette démarche aborde tous les aspects de l’activité.
Le syndicat, qui finance cette mission, propose de prendre en charge l’audit de leur entreprise aux professionnels de la batellerie qui le souhaitent. Audit effectué par un organisme indépendant, afin de garantir la transparence, l’objectivité et la confidentialité des conclusions. Les résultats donnent lieu à un rapport confidentiel remis à chaque entreprise volontaire.
Succès ! Plus des trois quarts des embarcadères demandent à être audités… Force est de constater que les professionnels se saisissent des résultats pour enrichir le contenu et la qualité de leurs promenades. En effet, après une première évaluation, préparatoire aux audits, les embarcadères ciblent leurs points faibles et y remédient par des solutions concrètes et parfois simples.
Désormais d’ailleurs, la grille de qualité est remise par les responsables des embarcadères à leurs guides saisonniers, comme base de travail.
Tous n’ont pas obtenu le label. Sur les quatre « recalés », l’un a pu obtenir le sésame recherché dès la seconde année après avoir réalisé les efforts demandés lors de l’audit.
Les autres se sont retirés de la démarche. Ils sont cependant restés partenaires du syndicat mixte avec qui ils continuent d’œuvrer pour d’autres actions. Aujourd’hui, en 2011, quatorze embarcadères sur les vingt proposant des balades guidées sont labellisés Engagement qualité marais poitevin.