Haute-Bruche - Bas-Rhin

La biodiversité, gagnante du projet de paysage

 

Espaces naturels n°32 - octobre 2010

Le Dossier

Jean Sébastien Laumond
Communauté de communes de la Haute-Bruche

 

En 1988, le Sivom du pays de Haute-Bruche se dote d’une charte intercommunale d’aménagement et de développement local. Celle-ci place le paysage comme un axe de travail à part entière.

Haute-Bruche. En 1993 une étude paysagère intercommunale découpe le territoire en quatre unités paysagères. Elle définit alors un programme de vingt et une actions. 
Mais pourquoi, au cœur du massif des Vosges, la Haute-Bruche s’intéresse-t-elle autant à ses paysages ?
Dans les années 70, le territoire est impacté par une crise qui met fin à la double activité agricole et industrielle-textile.
En 1980, le Sivom du pays de la Haute-Bruche est créé pour mettre en œuvre un contrat de pays, initiateur du développement économique local. 

En 1988, les élus se dotent d’une charte intercommunale (actualisée en 1995, 2002 et 2009) d’aménagement et de développement local. Celle-ci place le paysage comme un axe de travail à part entière.
Le territoire, délaissé par une agriculture déclinante, enlaidi par des friches industrielles, reboisé massivement en épicéas dans les fonds de vallée, avait tendance à afficher le visage de la résignation.
Ne pas accepter les friches comme une évolution inéluctable, produire des paysages de qualité qui expriment la réconciliation des gens du pays avec leur terroir, ne pas vouloir plagier les paysages traditionnels de cartes postales : tels étaient les défis qu’habitants et élus ont voulu relever pour construire un projet de développement durable construit sur des savoir-faire d’aujourd’hui et plaçant la nature au cœur du projet.
Cinq enjeux de reconquête paysagère sont identifiés (voir encart) : enjeux liés à la qualité du cadre de vie, mais aussi enjeux économique, touristique, identitaire, environnemental.

Cette réhabilitation est portée principalement par les associations foncières pastorales. Elles constatent aujourd’hui que la qualité paysagère a impacté aussi la qualité environnementale. Ainsi un bilan partiel, réalisé dans le cadre d’une étude toujours en cours (Sageece Bruche Mossig), met en lumière la valeur biologique des secteurs de fond de vallée.
Le graphique (page ci-contre) met en évidence le rôle de la politique paysagère au regard de la fonction des espaces pour la préservation, voire la reconquête de la biodiversité remarquable à l’échelle européenne, nationale et régionale.
Quant à la nature ordinaire, ces secteurs recèlent une flore ordinaire remarquable. Citons  : l’anémone sylvie, l’ail d’ours, le pétasite officinal, la primevère élevée, la renouée bistorte, la silène dioïque… Ces programmes ont contribué à leur prolifération.
Depuis quelque temps, on peut entendre le tarier des prés qui a, de nouveau, élu domicile dans le fond de vallée de la Climontaine. Son apparition fait suite à la rénovation pastorale menée par l’association foncière pastorale de Colroy-la-Roche. L’action a, entre autre, permis de supprimer massivement les pessières (forêts d’épicéas) ou encore de réhabiliter des anciennes « mères-royes » (rigoles superficielles).

Les démarches de reconquête paysagère, combinées à des pratiques agricoles extensives tel le programme Mesures agroenvironnementales territorialisées mis en œuvre en 2007 par la communauté de communes de la Haute-Bruche, contribuent donc à conforter la diversité des biotopes. Il en est ainsi de la préservation de landes d’altitude, de la réhabilitation des terrasses intra- et péri-villageoises ou encore des milieux humides de fonds de vallée.
En Haute-Bruche, peu à peu, les fonds de vallée s’ouvrent, les villages se dévoilent, les prairies verdoyantes prennent le pas sur la friche et les enrésinements de fond de vallée, les méandres de la Bruche et de ses affluents réapparaissent. Les vaches, moutons, chèvres paissent, les agriculteurs expriment leurs talents à travers des produits du terroir de qualité et nous font découvrir un paysage de montagne où le terme biodiversité est pleinement justifié. Ces paysages réouverts sont le fruit des acteurs locaux soucieux de leur patrimoine naturel.