Le bœuf des vallées au secours du râle des genêts

 

Espaces naturels n°20 - octobre 2007

Le Dossier

Odile Chancerelle
Chambre d’agriculture Maine-et-Loire

 

« L’Éleveur et l’Oiseau », la marque de viande bovine mise en place sur le site Ramsar des vallées angevines a permis d’amorcer des dynamiques d’appropriation de la biodiversité par les agriculteurs.

Plus de 60 % de la population nationale de râles des genêts habite les vallées angevines1. Dans le Maine-et-Loire, ce territoire exceptionnel offre ainsi 16 000 hectares de prairies inondables aux oiseaux migrateurs ou nicheurs. Mais, avec la déprise agricole, ce site d’accueil, conditionné par les crues, risquait de disparaître. C’est pourquoi, en 1990, pour enrayer cette évolution et malgré des intérêts parfois divergents, des acteurs locaux se mobilisent et élaborent un programme agri-environnemental en direction de la préservation du râle des genêts. La ligue pour la protection des oiseaux (LPO), le conservatoire des rives de la Loire, le parc régional Loire-Anjou-Touraine et les agriculteurs se trouvent ainsi associés. Un cahier des charges incluant des pratiques agricoles favorables à l’oiseau est ainsi élaboré.
En parallèle, des éleveurs de viande bovine se regroupent en association « Éleveurs des vallées angevines ». Et, afin de valoriser leur produit et faire connaître leurs actions, ils lancent « l’Éleveur et l’Oiseau, le bœuf des vallées », une marque qui doit leur permettre de commercialiser en proximité.
Pascal Poulard, vice-président de l’association témoigne : « Nous cherchions à pérenniser nos exploitations, tout en respectant l’équilibre naturel et en étant partie prenante des décisions prises sur le site. Ce mouvement a créé des relations privilégiées entre les éleveurs et les partenaires des vallées ; aujourd’hui nous avons une meilleure compréhension des points de vue de chacun. Démarré dans un contexte de crise pour la viande bovine, ce travail nous a aidés à garder espoir et à mieux faire connaître notre métier, tout en prenant davantage en compte les enjeux environnementaux. Jusque-là, nous n’avions pas de connaissances réelles, la rivière faisait partie de la vie quotidienne… Aujourd’hui, grâce aux contacts avec la LPO, nous mettons des noms sur les espèces. Nous sommes de plus en plus conscients de l’impact de certaines techniques et nous nous efforçons de former les jeunes. »
Un premier bilan démontre que des dynamiques d’appropriation de la biodiversité par les agriculteurs sont amorcées. Dans l’ensemble, les éleveurs vont au-delà des cahiers des charges. Il est devenu normal par exemple, de faucher de manière centrifuge et lente. « Le râle fait partie de notre patrimoine naturel », explique notre interlocuteur. Certains agriculteurs participent au suivi scientifique de l’oiseau, ou cherchent à mieux faire respecter les contrats par leurs pairs. Une plaquette d’information, sorte de code
de bonne conduite pour la fauche, est soutenue par l’association.

1. Le site des vallées angevines correspond aux basses vallées angevines et à la vallée de la Loire. Depuis 1995, il fait partie des réseaux zones humides d’importance internationale selon la convention Ramsar et Natura 2000 (zone de protection spéciale au titre de la directive Oiseaux).