Challenge

Articuler plan national d’actions et suivis sur site

 

Espaces naturels n°41 - janvier 2013

Le Dossier

Cédric Vanappelghem
CEN Nord-Pas-de-Calais
Xavier Houard
Opie
Anne-Laure Gourmand
MNHN, CERSP - Vigie

Antinomiques, les suivis nationaux et la veille locale ? Pas si sûr. Le plan national d’actions des odonates et le suivi temporel des libellules montrent que l’articulation est possible.

De prime abord, un protocole national de suivi ne sert pas forcément les objectifs du gestionnaire à son échelle d’intervention. Faut-il pour autant considérer que les approches sont cloisonnées ou bien une adaptation pour servir les objectifs locaux est-elle envisageable ?
Le plan national d’actions en faveur des odonates (PNA) dont une des actions est le Suivi temporel des libellules (Steli) semble démontrer que l’articulation réciproque est possible.
Le plan national d’actions en faveur des odonates concerne dix-huit espèces menacées sur le territoire métropolitain. Il vise l’acquisition de données pour évaluer leur état de conservation et améliorer leur prise en compte dans les politiques publiques.
Son périmètre d’action se déploie dans toutes les régions de la France métropolitaine, chaque Dreal désignant un opérateur régional. 
Le Steli, action transversale, est une des pierres de cet édifice. Son protocole a été conçu pour répondre à des questions nationales (quel est l’état de santé globale des populations de libellules ?) et pour servir de protocole de base afin de répondre à des problématiques locales (la nouvelle gestion de l’étang a-t-elle un impact sur les libellules ?). 
A priori cette double approche peut sembler illusoire : un protocole est toujours conçu pour répondre à une question. Et pourtant…

Gouvernance. Les conditions qui ont rendu possible cette articulation résident principalement dans la gouvernance mise en place. Ainsi, le Steli a-t-il été développé par un groupe mixte comprenant odonatologues de terrain, statisticiens et gestionnaires. Lors du test du protocole dans le Nord-Pas-de-Calais, les gestionnaires ont répondu présents. Outre le désir de participer à un programme national, ils cherchaient à saisir une opportunité afin que le Suivi temporel des libellules leur serve de base pour la mise en place d’une surveillance de routine, voire des suivis plus spécialisés sur une espèce comme l’agrion de Mercure (photo 1) ou l’aeschne isocèle (photo 2).
En effet, les observateurs sont libres de choisir leur site et la saison de suivi, ils définissent le périmètre et le temps de prospection. Les observations peuvent se faire à vue ou par capture, les observateurs débutants peuvent identifier des groupes d’espèces et, surtout, la collecte des données est calquée sur les habitudes des observateurs de terrain : faire une liste complète des espèces de libellules présentes sur le site de suivi.

Contraintes statistiques. Ainsi le Steli, dont l’objectif est d’obtenir des tendances nationales principalement pour les espèces communes pourra être compatible avec une veille patrimoniale pour les espèces à enjeu local.
Par ailleurs, le protocole a été longuement réfléchi afin de concilier les contraintes d’analyses statistiques, la proximité avec les méthodes d’inventaires utilisées et la facilité de mise en œuvre. La réflexion a été menée avec l’aide de Dutch Butterfly Conservation, qui pilote un suivi odonate depuis dix ans aux Pays-Bas. Après avoir expérimenté un protocole très standardisé mais peu mobilisateur, ils ont démontré qu’un protocole plus souple basé sur des inventaires répétés pouvait être tout aussi efficace.
La principale difficulté des observatoires nationaux étant de réunir un très grand nombre de données, c’est au regard de leur expérience que le protocole Steli a été conçu, en espérant mobiliser un maximum d’observateurs. Le Steli a été testé en 2011 dans la région Nord-Pas-de-Calais, son déploiement est en cours sur le territoire national. •

Participer au Steli ? http://odonates.pnaopie.fr/contact