Des outils participatifs

Instaurer une connivence

 

Espaces naturels n°13 - janvier 2006

Le Dossier

Michel SCHLAIFER
Etcharry Formation Développement

 

La concertation d’accord, mais comment s’y prendre, nous demandent les professionnels qui participent à des sessions de formation 1 ? Au-delà des outils et méthodes d’animation, la réponse est déjà contenue dans leur participation. En effet, le mixage des publics (espaces naturels, développement local, collectivités, réseaux associatifs, services de l’État…) recrée la complexité des situations de terrain. Ce qui est vécu au sein du groupe reproduit en partie ce qui se passe « en vrai » !
Or, il apparaît que l’animation d’une véritable concertation est avant tout un état d’esprit ! D’ailleurs, dans un groupe en formation, on repère vite les ersonnes dont la personnalité et la vision du métier leur donnent une posture tournée vers la concertation : ceux qui savent que l’autre détient une part de vérité qu’ils n’ont pas et dont ils ont besoin.
Comment s’y prendre ?
Ceci dit, la question des outils, des méthodes d’animation subsiste. Alors parlons-en. Il ne s’agit pas de détailler chaque technique 2, mais de les évoquer fin de donner l’envie au lecteur d’en savoir plus et, peut-être, de participer à un stage. En revanche, il est loisible de mettre en avant les points communs de ces méthodes. Car toutes placent le participant en situation de création collective ; toutes semblent s’éloigner de la problématique originelle pour mieux y revenir ; toutes prennent en compte la réalité psycho-sociologique des individus et des groupes, toutes permettent de « construire » en connaissance de cause.
En effet, pour ériger une solution collective, il est essentiel de mettre en lumière la logique qui pousse chacun d’entre nous à agir. On pourra donc, par exemple, demander au groupe de dessiner un « diagramme de Venn », c’est-à-dire un schémas sous forme d’ensembles inclus ou non l’un dans l’autre.
Chaque ensemble représente une logique d’actions, certaines s’agrègent alors que d’autres s’opposent. Le schéma final, le dessin pourrait-on dire, permet au groupe de visualiser et donc de prendre conscience du degré d’implication de chaque acteur vis-à-vis de la problématique et, du type d’interaction entre acteurs. Il est intéressant aussi de s’interroger sur les systèmes de représentations socioculturelles des acteurs. En effet, chacun d’entre nous est porteur de valeurs qui marquent nos prises de décision, même s’il n’y a pas de déterminisme direct entre nos représentations et nos actes. Une méthode consiste à demander à chacun de dessiner un blason. Celui-ci doit exprimer les valeurs indispensables à respecter dans l’action à mettre en oeuvre. Ce visuel est ensuite présenté au groupe qui compare, discute... et élabore un blason collectif. Ce faisant, il se met d’accord sur les valeurs qu’il souhaite défendre au travers de l’action commune. En revanche, au moment de recueillir des avis et des opinions, on pourra utiliser le métaplan (technique des petits cartons évoquée dans la page de gauche). Le recours aux cartons facilite l’expression de chacun. De plus, chaque carton (chaque idée) a le même poids et la même valeur ! Pour décrypter les logiques d’actions, comprendre les registres d’argumentaires évoqués par les parties et, aussi, repérer les systèmes d’alliance, une autre technique d’animation est issue de l’analyse sociologique de Boltanski. Le sociologue défend l’idée que l’Homme évolue au sein de plusieurs « cités » (une cité est une logique de justification basée sur une conception du bien commun) : cités civique, domestique, industrielle, de l’opinion, inspirée, marchande... Le groupe doit alors reconstituer ses propres cités, et donc les logiques d’argumentation qui lui appartiennent. Certes, toutes ces méthodes ont un côté atypique que l’on peut redouter. On retiendra pourtant qu’elles invitent à l’essentiel : une connivence entre acteurs.