Mode opératoire pour mettre en œuvre un nettoyage raisonné des plages
Par souci d’offrir une plage propre et confortable aux visiteurs, les plages sont trop souvent nettoyées de manière mécanique et systématique. Comment faire autrement…
Couramment utilisé, le nettoyage mécanique des plages aboutit à prélever une partie ou la totalité des laisses de mer (voir encart). Il provoque un appauvrissement de la richesse biologique, un déséquilibre du stock sédimentaire ; il peut accélérer l’érosion côtière…
Devant ce constat, une réflexion est menée depuis 20041. Elle vise à définir un protocole et des outils méthodologiques pour la mise en œuvre d’un nettoyage raisonné des plages2.
La première phase du protocole consiste à répertorier trois types de zones en fonction de leur type d’utilisation et intérêt écologique : plage urbaine à forts enjeux touristiques (fortement fréquentées telles les plages surveillées), plage à enjeux touristiques modérés et forts enjeux environnementaux ; plage à très forts enjeux environnementaux.
Ce diagnostic repose sur l’analyse de différents critères : localisation d’espèces remarquables, facteurs touristiques, caractéristiques du trait de côte, volume et typologie des laisses de mer, type de substrat, superficie de la plage… Il tient compte également des enjeux sociaux.
L’outil Natura 2000 peut constituer une aide financière aux collectivités. Un contrat, d’une durée de cinq ans, permet de financer le nettoyage manuel et sélectif à hauteur de 100 % sur des sites Natura 2000.
Un protocole de nettoyage raisonné est alors adopté par la commune concernée.
• Sur les plages à forts enjeux touristiques, un nettoyage mécanique
adapté sera préconisé. C’est le cas notamment sur les plages surveillées ou à faibles enjeux écologiques telles les plages « urbaines ».
• Sur les plages à forts enjeux environnementaux, on visera un nettoyage manuel régulier.
• Sur les plages à très forts enjeux environnementaux, le nettoyage manuel sera ponctuel. Il prendra en compte la période de nidification d’espèces protégées telles que le gravelot à collier interrompu et la sterne naine. Afin de préserver au mieux ces espèces vulnérables, aucun nettoyage ne sera préconisé lors de la période de nidification.
L’adoption du nettoyage manuel par la commune nécessite une forte organisation du travail. En effet, cette intervention demande du temps et des moyens humains (voir tableau de l’organisation du travail sur la commune de Portiragnes, plage de la Grande Maïre).
Cette technique réclame également une formation spécifique des agents et plus généralement des personnels qui accomplissent ces tâches.
Outre la connaissance du terrain, une demi-journée est nécessaire pour expliquer aux agents, d’une part les enjeux écologiques (rôle des laisses de mer, aspects floristiques), et d’autre part les pratiques de nettoyage préconisées. Ces formations peuvent débuter par une présentation en salle, accompagnée par des illustrations et se poursuivre sur le terrain.
Les réceptionnistes de mairie ou d’office du tourisme seront également formés aux enjeux environnementaux des hauts des plages ainsi qu’au plan de nettoyage en général.
Une liste des consignes de sécurité doit également être diffusée aux agents qui assurent le nettoyage.
Par la suite, des échanges entre agents techniques et conseillers environnementaux permettront de mieux adapter les pratiques.
Différents types d’acteurs sont concernés par ces opérations : conchyliculteur, paludier, pêcheur, pratiquants d’activités sportives
(kitesurf, char à voile…) ou encore commerçants/gérants de campings, restaurants… Il est indispensable de les intégrer, ou tout du moins de les informer, pour réaliser ce projet dans les meilleures conditions.
La commune devra définir son protocole d’acheminement et de traitement des déchets récoltés. À Portiragnes, le protocole indique que « les déchets pourront faire l’objet d’un tri. L’équipe de nettoyage (deux agents) devra regrouper les déchets par catégories (plastique, verre, ferraille) pendant ou à la fin de la collecte ». Par ailleurs, une fiche de suivi des macro-déchets permet de caractériser les déchets anthropiques trouvés sur la plage (types, volumes…).
Les sacs sont acheminés à pied. Concernant les déchets dits dangereux, tels que des fûts dont le contenant n’est pas identifié, il est conseillé de les laisser sur place et de prévenir les services techniques.
Les déchets valorisables (déchets endogènes, verre, métaux et bouteilles plastiques), non souillés par le sable et peu abimés par l’eau de mer, sont directement remis dans les containers de recyclage.
Il est également important d’établir des protocoles de suivis. Un suivi soutenu par des photographies mensuelles peut montrer l’évolution du haut de plage et différencier un secteur mécanisé et entretenu manuellement.
Il est également important d’évaluer la perception des usagers s’il y a maintien des laisses de mer. Une enquête de satisfaction permet de récolter des données.
1. Conduite par le Conservatoire du littoral et Rivages de France, avec le soutien de Procter et Gamble, et Veolia environnement. • 2. Des travaux ont été menés sur les sites pilotes : Assérac (Loire-Atlantique), Faute-sur-Mer (Vendée), Leucate (Aude), Portiragnes (Hérault)…