Marais du Daviaud (Vendée)

Des races locales menacées au secours de la biodiversité

 

Espaces naturels n°32 - octobre 2010

Gestion patrimoniale

Jean-Guy Robin
Chargé de mission scientifique, communauté de communes Océan-marais de Monts

 

Les espaces naturels « les marais du Daviaud » ont misé sur l’agriculture biologique et les races à faibles effectifs. Efficace et... casse-tête !

Originale, la biodiversité des marais atlantiques est liée à l’élevage extensif. Aussi en 1998, sur l’espace naturel sensible du Daviaud1, le comité scientifique de l’écomusée existant, a préconisé le développement de l’élevage en émettant un double souhait : que le cheptel du musée (vaches, chevaux, mouton, ânes) soit constitué de races anciennes, que la gestion agricole soit conforme aux règles de l’agriculture biologique. 
Un programme qui résulte de la vision holistique du territoire propre aux écomusées mais qui, hors du cadre théorique, tourne rapidement au casse-tête.

Dans ces zones à forte déprise agricole, trouver un éleveur devient vite la seule priorité et les difficultés ne manquent pas. La mise à disposition de terrain suffit rarement à modifier les pratiques d’une exploitation où changer de race et se convertir à l’agriculture biologique relève du challenge.
Ainsi, sur les espaces naturels sensibles des marais du Daviaud, les agriculteurs ont terminé leurs cycles agricoles en conservant leurs pratiques classiques. Et, malgré sa volonté, le gestionnaire a dû accepter cette inertie sans renoncer à ses objectifs initiaux.

Le programme s’est alors orienté vers deux axes. Dans un premier temps, la communauté de communes propriétaire a imaginé assurer elle-même l’exploitation.
L’idée était de développer un troupeau de bovins d’une dizaine de têtes. Leur gestion étant assurée par une association.
De race maraîchine (race ancienne, pratique agricole traditionnelle), les bovins étaient présentés dans le cadre du musée. Cette initiative a rapidement dû être arrêtée. Sa gestion impliquait deux salariés à plein temps. Une manière de devenir exploitant à part entière que n’a pas souhaité la collectivité du fait des coûts, de la relation privé/public…

En 2002, la rencontre avec un exploitant désirant s’installer est alors apparue comme une opportunité. Dès le départ, l’agriculteur pouvait intégrer les objectifs prévus : élevage extensif sur prairie humide, conduite en agriculture biologique et utilisation de race domestique à faible effectif. Première difficulté : l’agriculteur a dû acheter un bâtiment pour héberger le siège de son exploitation. Pour faire face à cet investissement et réussir, il a limité l’achat de matériel et prévu une montée en puissance progressive de l’importance de son cheptel en partant de deux vaches. Aujourd’hui, il est à la tête d’un troupeau d’une soixantaine d’individus et un second exploitant vient de le rejoindre.

Quant aux chevaux, moutons, ânes, si leur nombre, plus limité, a permis à la collectivité de continuer à les prendre en charge, le changement des pratiques a tout de même demandé une volonté profonde et force énergie. Le mouton de Belle-Île en est un bon exemple.
Race ancienne à faible effectif, on ne peut pour autant qualifier cette espèce de « rustique ». Les agnelages sont difficiles à gérer. Avec des mises bas régulières de trois ou quatre petits, les femelles peinent lors de l’allaitement. Dans la pratique, l’approche quotidienne est exigeante : les animaux demandent un suivi constant, des interventions sanitaires fréquentes, ils ont besoin de compléments alimentaires, de traitements anti-infectieux…
Cette nécessité d’intervention est d’autant plus nécessaire que le site est ouvert au public et que l’aspect visuel des animaux s’avère une priorité.
Malgré de lourdes difficultés de gestion, après quelques années ardues, après un travail important de sélection des individus (capacité d’agnelage, élimination des individus trop faibles), un troupeau fonctionnel de plusieurs dizaines de têtes semble aujourd’hui voir le jour.
Comme pour les bovins, la souche est susceptible, sur cette zone, de générer une activité agricole créatrice de biodiversité.

1. Profitant de la présence de l’écomusée du Daviaud, le conseil général de la Vendée a, en 1997, créé l’espace naturel sensible du Daviaud au nord-ouest du département. Quatre-vingts hectares sont gérés par la communauté de communes Océan-marais de Monts.