Dunes de la slack - Pas-de-Calais

Quelle efficacité, les études d’incidences ?

 
On a tourné un film dans un site natura 2000

Espaces naturels n°39 - juillet 2012

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Xavier Douard
Eden 62

 

L’étude d’évaluation des incidences obligatoire avant toute activité impactante dans un site Natura 2000 est-elle vraiment efficace ? Dans les dunes de la Slack, l’impact de la fréquentation lié au tournage d’un film n’a pu être limité que par la présence du gestionnaire à chaque heure du tournage.

En 2010, le Conservatoire du littoral reçoit une demande de tournage dans les dunes de la Slack dont il est propriétaire. Le scénario raconte l’histoire d’un marginal vivant dans le milieu dunaire.
Mais le site est classé Natura 2000, et l’autorisation suppose la réalisation préliminaire d’une étude d’incidences.
Aussi, après un rapprochement avec la Dreal Nord-Pas-de-Calais pour connaître la démarche à accomplir, une rencontre est organisée sur le terrain entre le réalisateur, le Conservatoire du littoral et Eden 62 (gestionnaire du site).
Le cinéaste présente son projet, expose les lieux de tournage envisagés. C’est l’occasion d’expliquer qu’en raison de leur fragilité, certains habitats (pelouses dunaires à mousses et lichens, pannes dunaires) ne peuvent supporter les séances de tournage initialement prévues.
La date du tournage donne également lieu à conditions. La forte fréquentation du site en période estivale est mentionnée. Le tournage aura donc lieu en automne plutôt qu’au printemps. Le risque étant que les prises de vues attirent les badauds en nombre, hors sentier.
Suite à ce rendez-vous, le réalisateur revoit le positionnement des zones de tournage. Il dépose son dossier d’étude d’incidences, réalisé avec l’appui d’un bureau d’études.
C’est une fois l’aval donné par la Dreal que le tournage commence ; il durera quinze jours. Pour surveiller les bonnes conditions et minimiser l’impact du piétinement, Eden 62 prend la décision d’y détacher un garde nature départemental.
Les horaires de tournage retenus et les conditions météorologiques ne simplifient pas le travail : le réalisateur admettra d’ailleurs que le garde nature ne peut pas forcément être disponible pour les assister au moment où les conditions sont favorables pour le tournage.
Au final, l’impact du tournage sur les habitats d’intérêt communautaire les plus fragiles a été assez limité. Et, malgré les difficultés, l’encadrement permanent du tournage par Eden 62 s’est révélé être un bon choix. Il a, en effet, permis de limiter l’impact du piétinement hors sentier, la réalisation d’une scène occasionnant le passage répété d’une quinzaine de personnes dans le même secteur, parfois pendant plusieurs jours de suite.
Le transport du matériel s’est toujours fait à dos d’homme en raison de la topographie accidentée, des fourrés d’argousiers et de la fragilité des habitats traversés.
De cette présence permanente, on conclura que les préconisations formulées dans l’étude d’incidences ne peuvent à elles seules éviter les dégradations. Par manque de connaissance des particularités et des enjeux écologiques du site, le réalisateur peut rapidement commettre des impairs si le tournage n’est pas suivi de près par le gestionnaire du site Natura 2000. L’étude d’incidences ne doit pas être entendue comme une autorisation administrative par le demandeur mais comme un balisage encadrant une activité. Elle doit constituer un seuil à ne pas franchir sur lequel le gestionnaire du site doit s’appuyer pour trouver le compromis entre préservation et organisation d’événements.
Enfin, l’autorité administrative devrait exercer un contrôle en temps réel pour s’assurer que les engagements de l’étude d’incidence sont bien en adéquation avec la réalité du terrain. •