Conservatoire des espaces naturels du Languedoc-Roussillon

Qui peut sauver l’aigle de Bonelli ?

 
Gestion patrimoniale

Olivier Scher
Coordonnateur du plan national d’actions pour l’aigle de Bonelli Conservatoire des espaces naturels du Languedoc-Roussillon

 

L’aigle de Bonelli est menacé. La question se pose d’autant plus crûment que, entre 2008 et 2010, cinq d’entre eux ont été retrouvés électrocutés dans une microzone, à l’est de Béziers (Hérault).
L’électrocution constitue près de la moitié des cas connus de mortalité et touche presque essentiellement les oiseaux juvéniles et immatures (un à trois ans). Non attachés à un territoire donné et attendant de former un couple pour se reproduire, ces oiseaux passent leurs premières années dans des secteurs riches en proies non occupés par des individus adultes. Ces zones d’erratisme sont peu connues. Jusqu’à présent, seul le secteur Crau-Camargue était identifié.
Paradoxalement, la découverte de ces cinq oiseaux pourrait servir la cause de l’aigle de Bonelli. Parce qu’elle a permis d’identifier une nouvelle zone d’erratisme et que, dès 2009, elle a relancé la question de l’impact de l’électrocution et de la percussion au sein du Comité national avifaune (CNA), instance composée de la Ligue pour la protection des oiseaux, France nature environnement, mais également Électricité réseau distribution France (ERDF) et Réseau de transport d’électricité (RTE). Un acteur détiendrait-il les clés de la conservation de l’aigle de Bonelli en France ?

Un effort particulier a été demandé aux deux transporteurs d’électricité afin de sécuriser les pylônes dangereux identifiés par les acteurs du plan national d’actions pour l’aigle de Bonelli.
Ces cartographies, initiées dès le début des années 90 par les associations de protection de la nature, servent de base à la planification des travaux de sécurisation. Un document, réalisé en mars 2010, couvre une zone d’environ 28 km2 centrée sur les sites d’électrocution à l’est de Béziers.
Une cinquième électrocution, fin 2010, amène ERDF à sécuriser en urgence un secteur de 100 ha, visiblement très attractif pour les rapaces (milieux ouverts et gibier abondant). Par convention avec le Conservatoire des espaces naturels du Languedoc-Roussillon, coordonnateur du plan national d’actions, ERDF s’engage à traiter cette zone avant le retour des prochains juvéniles à la fin de l’été 2011.
L’avenir nous dira si ces travaux portent leurs fruits. Des résultats encourageants poussent cependant à croire que tel sera le cas.
Les recherches conduites par Aurélien Besnard du Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive de Montpellier démontrent que les travaux de neutralisation engagés depuis 1997 dans l’aire de présence de l’aigle de Bonelli (1 743 pylônes neutralisés sur 5 092 identifiés) se traduisent par une augmentation du taux de survie de toutes les classes d’âge et plus particulièrement des individus âgés d’un an.
L’avenir de l’aigle de Bonelli en France est donc fortement lié à l’engagement d’ERDF et de RTE à mettre en place des mesures de protection sur leurs réseaux.