Des visages dans le paysage

 
Quel avenir pour les guides nature saisonniers ?

Espaces naturels n°23 - juillet 2008

Management - Métiers

Joël Demasson

 

L’une ne parle que d’oiseaux, l’autre est spécialiste des fleurs de montagnes et le troisième expert en traces d’animaux. Femmes ou hommes, les guides nature saisonniers ont entre vingt et soixante ans. Leurs parcours sont à l’image de leur diversité, du thésard au dessinateur naturaliste, ils sont moniteur de ski en hiver, BTS nature débutant en recherche d’un premier job, naturaliste amateur retraité. Tous différents et pourtant semblables dans cette passion pour la nature qui depuis toujours les jette sur les sentiers.
Si la fonction de guide nature est sans âge, son expansion est plus récente. Elle répond à des demandes sociales émergentes et très diversifiées. En zone littorale, le guide nature sensibilise les publics à la fragilité des écosystèmes et concourt à limiter les effets de la surfréquentation estivale. Dans les territoires ruraux, il participe à des actions pédagogiques auprès des scolaires et à créer une animation touristique pour conquérir de nouveaux publics.
Il est très souvent à la croisée de politiques publiques longtemps perçues comme contradictoires. Ainsi, sur la réserve naturelle de l’Étang noir, le guide nature recruté pour l’été répond à une demande d’activités d’éducation au milieu naturel ainsi qu’à une attente des opérateurs touristiques soucieux de valoriser leur territoire. De même, en baie de Somme, la politique économique et touristique de la chambre de commerce et d’industrie d’Abbeville se concrétise par une offre de sorties nature destinées à attirer le public ; cependant, l’action des guides nature contribue aussi à canaliser les 40 000 visiteurs spontanés.
La diversité de lieux, de structures et de politiques publiques se traduit par des situations juridiques et professionnelles très contrastées. Les uns se font payer, les autres sont bénévoles, les plus nombreux sont salariés du service public. Ils relèvent de collectivités territoriales ou d’associations gestionnaires, mais peuvent également exercer en libéral ou être employés par des opérateurs de l’économie touristique. Traversée par des logiques allant du bénévolat à l’approche métier, la profession n’est ni structurée ni réglementée. À ce jour, la réglementation tend à la considérer comme une des spécialités des métiers de l’animation, ce qui conduit à lui appliquer la convention collective nationale correspondante.
Dans la pratique, les employeurs se consacrent à la qualité du recrutement, à la formation et à la professionnalisation des intéressés. Ainsi, pour recruter ses vingt guides saisonniers, le conseil général de l’Isère effectue un premier tamisage à partir de plusieurs centaines de candidats titulaires d’un diplôme de secouriste. L’objectif est de repérer les passionnés de la nature, ceux qui ont une spécialité, une histoire, quelque chose à dire. La sélection se poursuit par des entretiens avec mise en situation. Les candidats retenus suivent une formation interne de cinq jours conjuguant visites de sites, rencontres d’acteurs et formation aux espaces naturels sensibles. Ils sont alors agréés pour intervenir spécifiquement sur ces sites. De son côté, la CCI d’Abbeville a opté pour une démarche qualité. Les guides nature, organisés en filière, ont rédigé une charte professionnelle et un référentiel qualité. Les postulants guides suivent une formation qui débouche sur un agrément valable trois ans. La qualité de leurs prestations est vérifiée en situation, par des auditeurs. Pour sa part, l’association Alsace nature propose un cycle de deux ans à raison d’un week-end par mois. La formation, payante, peut être prise en charge par l’employeur. Les candidats ne sont pas sélectionnés sur leurs objectifs professionnels, mais sur leur motivation. Ils s’engagent à organiser au moins une visite guidée bénévole.
Aussi riches soient-elles, ces expériences, encore ponctuelles et isolées, ne suffisent pas à organiser une profession dont on espère qu’elle a un véritable avenir devant elle.

En savoir plus
Didier Fahnauer - Alsace nature
>>> Mél : Communication1@alsacenature.org
Cati Ducailar - Réserve naturelle de l’Étang noir
>>> Mél : rn.etangnoir@libertysurf.fr
Gérard Deserable - CCI d’Abbeville
>>> Mél : g.deserable@littoral-normand-picard.cci.fr
Marie-Anne Chabert - Conseil général de l’Isère
>>> Tél. : 04 76 00 36 45.
Convention collective nationale de l’animation
>>> www.legifrance.gouv.fr
Formation d’animateur nature
>>> www.jeunesse-sports.gouv.fr rubrique emploi-formation
>>> www.metiers.espaces-naturels.fr