Aire marine protégée

D’une définition à l’autre

 
Le Dossier

Sébastien Mabile
Docteur en droit, avocat au barreau de Paris, Lysias Partners

 

Derrière le vocable « aire marine protégée » se cache une diversité de statuts juridiques. Les objectifs prioritaires de ces espaces géographiques peuvent diverger mais, toujours, il s’agit d’assurer la conservation des services écosystémiques et valeurs culturelles qui y sont associés.

La définition de l’aire marine protégée est un préalable important. Celle-ci permet de jauger la pertinence des politiques publiques en faveur de la protection du milieu marin et d’évaluer l’objectif fixé par les lois Grenelle qui visent à classer 20 % des eaux françaises en aires marines protégées à l’horizon 2020.

Qu’est-ce qu’une AMP ? L’Union internationale pour la conservation de la nature (lignes directrices de 2008) définit une aire protégée comme étant « un espace géographique clairement défini, reconnu, spécialisé et géré par des moyens légaux ou d’autres moyens efficaces, visant à assurer la conservation à long terme de la nature et des services écosystémiques et valeurs culturelles qui y sont associés ». 
En droit interne, les aires marines protégées sont définies à l’article L334-1 III du code de l’Environnement comme étant les parcs naturels marins, les parties maritimes des sites relevant du Conservatoire du littoral ainsi que les parcs nationaux, réserves naturelles, arrêtés de biotope et sites Natura 2000 comportant une partie maritime.
L’article R334-2 du code de l’Environnement prévoit que d’autres espaces maritimes puissent être reconnus comme aires marines protégées, dès lors que leur protection, restauration et gestion durable requièrent des mesures réglementaires ou contractuelles ou un programme d’actions.

Les cantonnements de pêche ? Dans le cadre de cette procédure de reconnaissance d’autres catégories d’aires marines protégées, il a été jugé nécessaire de définir quels autres types d’espaces maritimes pouvaient répondre à cette définition, notamment en ce qui concerne les cantonnements de pêche maritime.
Leur reconnaissance en tant qu’aires marines protégées a été débattue pour finalement être rejetée en raison de l’absence d’organisme de gestion obligatoire et de leur objectif limité aux seuls maintien ou accroissement des stocks halieutiques.
Au niveau international, l’UICN exige en effet que l’aire soit gérée, ce qui « implique plusieurs démarches actives pour conserver les valeurs naturelles pour lesquelles l’aire protégée a été créée », mais également que « les gestionnaires envisagent la bonne santé et la diversité de l’écosystème dans sa globalité, et mettent ces préoccupations en tête de leurs objectifs ».
Dans cette perspective, les nouvelles lignes directrices pour les aires marines publiées en 2012 considèrent que les aires de gestion des pêches ne sont pas des aires marines protégées, mais qu’elles « peuvent s’avérer une composante importante pour la gestion d’une AMP ». Des cantonnements de pêche permettent ainsi d’interdire la pêche maritime dans certaines zones de la Réserve naturelle des Bucchi di Bunifaziu, elle-même considérée au sens de l’article L334-1 du code de l’Environnement comme une aire marine protégée.

D’autres statuts. Au-delà des cantonnements de pêche, d’autres aires, établies par d’autres statuts que ceux visés par l’article L334-1 du code de l’Environnement, répondent à la définition de l’UICN issue des lignes directrices pour les aires marines de 2012. Il en est ainsi du Parc marin de la côte Bleue, dont le fondement juridique est un arrêté de concession d’endigage et d’occupation du DPM, ou des sanctuaires pour mammifères marins Agoa dans les Caraïbes ou Pelagos en Méditerranée.
Par arrêté en date du 3 juin 2011, la ministre de l’Écologie a donc étendu le champ de compétence de l’Agence des aires marines protégées aux aires délimitées en application des instruments internationaux mondiaux et régionaux de protection de la nature.
Cette reconnaissance a permis d’inclure parmi les aires marines protégées des sites ne relevant d’aucune catégorie juridique particulière mais répondant néanmoins à la définition de l’UICN.
Si le droit interne a donné une définition à l’aire marine protégée, le référentiel de la notion demeure la définition de l’UICN, précisée par les lignes directrices de 2012. •