Avant-propos
« Le sauvage sauvera-t-il le monde ? », comme le suggérait Henry Thoreau à la fin du XIXe siècle, alors en plein âge d'or de l'idée de wilderness ?
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Notre rapport au sauvage : passionnément ou pas du tout ?
Les citoyens, comme les pouvoirs publics, portent un regard ambivalent sur le sauvage. Même si certaines études montrent une incontestable demande pour du « sauvage », il serait illusoire de considérer l’opinion publique comme un tout, identique en tous points du territoire national, et plus encore de ne pas prendre en considération qu’elle peut s’exprimer différemment selon le degré de proximité et surtout de fréquentation de l’espace en discussion sur son avenir.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
L'Anthropocène est-il contre-nature ?
Deux lectures de l'Anthropocène1 ont tendance à converger : une lecture postmoderne, plutôt portée par les sciences humaines et sociales, qui affirme la fin de la nature au profit d'une multitude d'hybrides entre nature et artifice, et une lecture prométhéenne qui affirme que l'Homme doit désormais prendre le contrôle du système Terre, en pilotant les écosystèmes grâce à l’ingénierie écologique et le climat grâce à la géo-ingénierie.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Natures sauvages
Concernant l'appréhension du sauvage chez les différents peuples sur lesquels vous avez travaillé, qu'est-ce qui vous a le plus marquée ?
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Rewilding avec les grands herbivores
Le concept de rewilding (voir définition p.26) est né de la volonté de certains gestionnaires d’espaces naturels, notamment aux Pays-Bas dans les années 1980, d’initier le « pâturage naturel » sur quelques réserves avec les deux groupe d'espèces référentes de grands herbivores (bovins et chevaux). Dans ce cadre, différentes races archaïques (Highland cattle, Galloway…) ou substituts des espèces disparues (aurochs reconstitué, tarpan) sont utilisées dans des contextes de « dédomestication ».
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Des sanctuaires de nature dans les communes volontaires
La nouvelle Charte du Parc naturel régional des Vosges du Nord prévoit de créer, à l’initiative des communes, un sanctuaire de nature spontanée dans chaque village du parc et de les mettre en réseau. Il ne s’agit pas de donner un statut réglementaire à ces propriétés communales ni de les choisir parmi des zones déjà inventoriées sur le territoire du parc.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Les espaces de naturalité : préservation, reconnaissance, valorisation
Bien qu'elle ne soit pas seule concernée, c'est souvent à la forêt que l'on pense à propos de naturalité, à laquelle sont consacrés des espaces allant d'îlots de sénescence de quelques hectares jusqu'à de plus ou moins grandes réserves intégrales. À leurs différentes échelles spatiales, ces objets se complètent, mais tous ne bénéficient pas d'une même reconnaissance au regard de politiques d'espaces protégés, et leur visibilité s'en ressent d'autant.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Quel degré d’interventionnisme pour quelles espèces?
Suite à la dégradation des ouvrages hydrauliques et des digues dans les anciens salins de la Réserve naturelle régionale de Sainte-Lucie, les gestionnaires– Parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée et commune de Port-La Nouvelle – se sont trouvés dans l’impossibilité de gérer le site, propriété du Conservatoire du littoral, tel que prévu initialement. Il s'agissait de favoriser les Sternes naines et autres laro-limicoles par la création d’îlots de reproduction accompagnée d’une gestion précise des niveaux d’eau.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Délaisser la wilderness ?
Faut-il abandonner l'idée américaine de wilderness (cf.définition p. 29) pour continuer à penser le sauvage ? Cette question est au cœur d'un débat qui voit s’affronter des environnementalistes depuis les années 1990 et qui est repris dans les pages de deux volumineux ouvrages parus à dix années d'intervalle (cf. En savoir plus). Produit d'une conversion du regard sur la nature sauvage qui s'opère au XIX e siècle, le mythe heureux de la wilderness occupe une place centrale dans l'histoire du préservationnisme américain.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Des « rivières joyaux » que nous pouvons encore préserver
En 2007, suite au lancement du chantier d’un barrage EDF jugé inutile sur le Rizzanese, un des derniers fleuves côtiers méditerranéens intacts de Corse, le WWF, ERN, quelques acteurs de la conservation et du monde de la pêche ont lancé un nouvel outil au service de la naturalité des rivières : Rivières Sauvages.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Fédérer autour d'une espèce : comment faire et quelles sont les limites ?
La première clé de réussite d’une mobilisation autour d'une espèce, réside sans doute dans l'image de l'espèce elle-même. Concernant la Grue cendrée, nous sommes en présence d’une espèce majestueuse qu’il est possible d’aborder sans passion, si ce n’est celle de mieux la connaître et l’observer. L’espèce est strictement protégée, elle n’occasionne aucun dégât à ce jour sur les cultures de la région, l’occupation des dortoirs n’entrave pas les activités civiles et militaires en place. Pour autant, les enjeux de conservation sont réels.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Réintroduire, laisser-faire ou les deux ?
Alors que l'acceptation sociale est invoquée contre les projets de renforcement des populations et les réintroductions, les enquêtes montrent que le public est souvent favorable au retour des espèces.
Espaces naturels n°55 - juillet 2016
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Des contrats pour préserver la biodiversité grâce aux activités agro-pastorales
Déboiser, épierrer, débroussailler, capter l’eau de pluie, mettre en culture les meilleures terres... c'est l'Homme, qui, de la préhistoire à nos jours, a façonné le paysage des Causses méridionaux. Or, ces activités connaissent depuis quelques décennies des bouleversements économiques qui fragilisent les exploitations agricoles et ont amené les agriculteurs à changer progressivement leurs pratiques agro-pastorales.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Pour lutter, il faut personnaliser
La croissance des jeunes animaux est une des clés de réussite en élevage. C’est aussi bien le cas pour les animaux élevés pour leur viande que pour les femelles laitières. Leur stature au moment de la première mise-bas conditionne leur carrière de productrice. Or, le principal effet du parasitisme sur les jeunes ruminants est de pénaliser leur croissance.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Réconcilier ressource fourragère et biodiversité ? Un casse-tête !
Au XVIIIe siècle, les troupeaux étaient la principale richesse des villages ; ils sont aujourd’hui quasiment disparu des paysages du PNR de la Narbonnaise en Méditerranée. Les arguments en faveur de la réintroduction de l'activité pastorale sont nombreux : maintien des milieux ouverts, protection contre l'incendie, maintien des mosaïques paysagères.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Mangez équilibré, mangez biodiversité
Un sentiment encore très répandu est que biodiversité et valeur fourragère s’opposent fortement. Les uns déplorent la faible production des prairies à forte biodiversité et estiment que les politiques publiques environnementales les poussent à ne pas intensifier. Les autres regrettent la banalisation écologique des prairies faisant l’objet d’une forte intensification en vue d’accroître le rendement.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
La biodiversité, un service pour les éleveurs
Les éleveurs qui font leurs fromages eux-mêmes connaissent bien l'influence des plantes sur le lait produit. «Les éleveurs qui vont au Salon de l'agriculture participer au concours de Beaufort savent très bien quel fromage choisir. Un dont le lait vient de zones spéciales, où la végétation est très diverse, pas trop humide, en général à une altitude intermédiaire » raconte Bruno Martin, chercheur à l'Inra de Clermont-Ferrand. L'exploration de ce savoir-faire empirique est en cours dans les laboratoires.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Technicien agri-environnement : le pilier de la collaboration
Le technicien (ou chargé de mission) agri-environnement a toute sa place dans un espace protégé. Ce sont en effet les agriculteurs qui sont les principaux gestionnaires de l’espace ; selon les enjeux et le type d’agriculture pratiqué, ils sont des acteurs incontournables.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Mettre en valeur le travail des éleveurs
Écologues et éleveurs ont tous les deux besoin que l'activité pastorale soit pérenne. C'est la philosophie de Stéphane Hippolyte, qui anime Pasto'Loire, pour le CEN Centre-Val de Loire. « Ces éleveurs ont déjà fait le choix de sortir des circuits classiques de la grande distribution. Ils élaborent des circuits courts et transforment eux-mêmes leurs produits. Ils s'en sortent bien par le bouche à oreille.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Le dossier lu par... Thierry Lecomte
À l'heure où les projets de loi et d'Agence de la biodiversité font florès, il est grand temps de songer aux milieux ouverts, lesquels, de la plaine à la montagne, des situations les plus humides aux plus sèches, abritent des milliers d’espèces – banales ou patrimoniales – mais qui déterminent des écosystèmes originaux tant par les paysages produits que par les fonctionnalités associées.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Accepter un espace public redessiné
Tolérer les herbes aux pieds des murs, désacraliser le trottoir, s’approprier l’espace public, etc. Quelle meilleure approche que le street art pour changer les perspectives de nos rues ? En effet, par habitude, l’herbe a perdu sa place dans l’espace urbain. Elle y est devenue une « mauvaise herbe » indésirable voire un signe de saleté. Ce qui est une difficulté quand on a pour objectif de limiter l'usage des pesticides – pour, en l'occurrence, prévenir les risques de transfert de contaminants vers les zones humides littorales.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Vivre de la nature et la faire vivre avec son troupeau
Est-ce que les éleveurs avec qui vous travaillez se préoccupent de la nature et des enjeux environnementaux ?
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Un pacte pastoral pour un patrimoine commun
Négocier le droit. Non, il n’y a pas là d’incompatibilité. C'est même le moyen de parvenir localement à des objectifs qui échappent au droit « d'en haut ». En faisant participer les acteurs territoriaux à la décision, on peut orienter les actions collectives et les normes dans les comportements individuels, tout en respectant le droit national ; on parle de « droit négocié »*.
Espaces naturels n°54 - avril 2016
Protocole mal calé, le petit coup de pouce des biostatisticiens
La pie-grièche écorcheur est une espèce d’intérêt communautaire (1). Pour en estimer l’abondance dans la zone de protection spéciale Forêt, bocage, étangs de Thiérache, une étude est entreprise en 2009. Or, une fois le protocole monté et le travail de collecte effectué, le Parc naturel régional de l’Avesnois (opérateur) s’aperçoit de son inadéquation. Les résultats ne peuvent pas être interprétés.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Combien ça coûte ?
Que faut-il intégrer dans le coût d’un suivi ? La première variable à prendre en compte est l’effort d’échantillonnage qui comprend le nombre de sites à inventorier, leur répartition spatiale, le nombre et la fréquence des visites envisagées ainsi que les mesures prévues (nature et nombre de taxons, variables environnementales).
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Donnez toutes les chances de réussite à votre suivi
Réserves naturelles de France a l’expérience ! Depuis plus de vingt ans, l’association développe des protocoles standardisés de suivi d’espèces et d’habitats. Des protocoles souvent élaborés en partenariat avec des organismes scientifiques et qui correspondent à des besoins identifiés dans les plans de gestion. Tout pourrait donc être pour le mieux mais la réalité montre que certains suivis tombent en dormance après quelques années. Ce constat met en cause l’animation, la centralisation et le traitement des données.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
C’est possible : suivre une population sans pouvoir identifier les individus
Déclin, augmentation, stabilité… Les suivis démographiques ont vocation à identifier les dynamiques des populations, les causes de changements observés et les processus sous-jacents. Chez les plantes par exemple, ces études impliquent de repérer des individus et d’observer leurs transitions entre différents stades de vie : de graines à plantules jusqu’à l’état reproducteur.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Voici venu le temps de l’harmonisation
Depuis 1963, chacun des parcs nationaux a mis en place un dispositif d’inventaire et de suivi de son patrimoine naturel. Ces démarches répondent aux besoins de connaissances utiles pour gérer le territoire protégé et, également, pour communiquer sur ses richesses. In fine, nous sommes aujourd’hui en présence d’une abondance de données naturalistes mais également devant une diversité de protocoles.
En 2010, Parcs nationaux de France a souhaité y voir clair.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Articuler plan national d’actions et suivis sur site
De prime abord, un protocole national de suivi ne sert pas forcément les objectifs du gestionnaire à son échelle d’intervention. Faut-il pour autant considérer que les approches sont cloisonnées ou bien une adaptation pour servir les objectifs locaux est-elle envisageable ?
Le plan national d’actions en faveur des odonates (PNA) dont une des actions est le Suivi temporel des libellules (Steli) semble démontrer que l’articulation réciproque est possible.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
« Les scouts vont plus loin dans leur rapport à la nature »
Vous dites que les Scouts et guides de France veulent, aujourd’hui, aller plus loin dans le rapport à la nature. Qu’est-ce que cela veut dire ?
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Encore d’actualité, le suivi des populations ?
Suivre l’évolution des populations d’espèces est loin d’être une nouveauté et certains réseaux de gestionnaires s’y attellent depuis fort longtemps. C’est le cas notamment des espèces à enjeux cynégétiques pour lesquelles une connaissance fine des populations et de leurs trajectoires conditionne le niveau des prélèvements admissibles. Cependant, le suivi des populations d’espèces est-il encore d’actualité à une époque où l’accent est mis sur l’état de conservation des habitats naturels ?
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Connaître, oui. Mais pour quoi faire ?
Plusieurs raisons conduisent le gestionnaire à mener des suivis. Il y a sans conteste des origines objectives et d’autres résultant de propositions de partenaires (la recherche par exemple). En premier lieu, les suivis relèvent d’un enjeu de connaissance. Ils vont permettre au professionnel de valider, ou non, ses choix. En effet, le gestionnaire voudra évaluer sa gestion (ai-je atteint mon objectif ?), qu’elle soit active ou relève de la non-intervention, et pour ce faire, il devra analyser les résultats de suivis.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Suivi, les trois questions préalables
Tout suivi suppose que les informations récoltées soient suffisamment pertinentes pour permettre de comprendre le fonctionnement du système écologique et d’en éclairer la gestion. En pratique, cette maxime nécessite d’adopter, préalablement à toute action, un petit nombre de principes.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
Ne cédons pas à l’effet de mode
Pour la faune comme pour la flore, les professionnels de la nature reçoivent des invitations de plus en plus nombreuses à participer à des opérations de suivis d’espèces. Effet de mode ou réelle prise de conscience de la puissance de ces dispositifs en matière de conservation ? Je ne parle pas ici des suivis d’individus, ou de protocoles appliqués par des chercheurs avec un objectif très ciblé et pour un temps limité. Je veux parler de ceux visant les populations d’une espèce et qui mobilisent parfois un grand nombre d’observateurs à intervalle régulier. Ces suivis ne sont pas nouveaux.
Espaces naturels n°41 - janvier 2013
La biodiversité dans les forêts publiques
Avec 1,8 million d’hectares de forêt domaniale et 2,7 millions d’hectares de forêt appartenant à des communes, l’ONF gère 30 % de la forêt française de métropole. Or, le contrat signé entre l’État et l’ONF en 2001 détaille les actions en faveur de la biodiversité1 :
• renforcement du réseau des Réserves biologiques intégrales afin de le rendre représentatif de la diversité des habitats forestiers de la forêt domaniale ; création de trois Réserves biologiques intégrales de plus de 2000 ha (en plaine, en montagne, en région méditerranéenne) ;
Espaces naturels n°7 - juillet 2004
Son protocole de suivi devient une référence
Une partie des boisements de la réserve naturelle de l’île de la Platière n’a presque jamais fait l’objet d’intervention sylvicole. Ce diagnostic, effectué notamment par l’étude de cartes en date du 19e siècle, est confirmé par l’observation. La structure forestière est typique des forêts denses : présence de gros arbres, pas de souches visibles, abondance du bois mort. Ce haut degré de naturalité confère, à ces trente hectares, un fort enjeu patrimonial. Dès 1991, le premier plan de gestion vise la mise en place d’une réserve forestière intégrale qui, aujourd’hui, couvre 34 ha 20.
Espaces naturels n°7 - juillet 2004
Les cerfs, les chevreuils et la forêt
Les populations de cerfs et de chevreuils ont fortement progressé ces dernières décennies. Cette évolution a également touché le Parc national des Cévennes dans lequel 136 cerfs et 83 chevreuils ont été réintroduits dans les années 1975. Depuis cette date, le Parc a mené une politique destinée à maintenir un équilibre. Les mesures touchent l’aménagement du milieu et du plan de chasse. Dans ce territoire, en effet, les activités forestières et agricoles jouent un rôle déterminant et la pression des cervidés peut constituer un déséquilibre. La forêt y occupe 63 % de la zone centrale.
Espaces naturels n°7 - juillet 2004
Concertation et gestion des désaccords
Dans l’après-guerre, la campagne française se vide de sa population et de grands programmes de reboisement sont entrepris, pour utiliser économiquement les terres abandonnées. Et dans les années soixante-dix, le Morvan se réveille avec la gueule de bois : les Parisiens, fuyant leurs cités pour retrouver la campagne de leur enfance, tombent sur des plantations forestières denses, vert linceul d’un monde révolu.
Espaces naturels n°7 - juillet 2004